L’abjuration
du Pasteur Sten Sandmark
et la conversion du Pasteur Roger Schutz
par Yves Chiron
Hier
30 juillet, en l’église de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, à Paris, un
pasteur luthérien suédois, Sten Sandmark, et un autre protestant, ont
abjuré solennellement « toute erreur, hérésie et secte
contraires à la sainte Eglise catholique, apostolique et romaine ».
Le pasteur Sandmark avait fait, en juillet dernier, une
« Déclaration publique » pour expliquer les raisons de son
« retour à l’Eglise » (texte complet ci-joint).
Cette
conversion a attiré l’attention des médias suédois et allemands. La
cérémonie solennelle d’abjuration, qui a eu lieu hier, contraste avec
la conversion, discrète, qui avait été celle du Pasteur Schutz,
fondateur de la Communauté de Taizé. Conversion si discrète qu’elle
ne fut apparente que le jour des funérailles de Jean-Paul II lorsque le
cardinal Ratzinger, aujourd’hui Benoît XVI, lui donna la communion.
Certains se sont indignés, et s’indignent encore, que le futur Benoît
XVI ait donné la communion à « un protestant ». C’est qu’ils
ignoraient que frère Roger Schutz avait fait, depuis plusieurs années,
profession de foi catholique.
L’abjuration
du pasteur Sandmark
Le
pasteur Sandmark a manifesté l’intention de rejoindre la Fraternité
Sacerdotale Saint-Pie X. Aussi la cérémonie d’adjuration d’hier
était-elle présidée par Mgr Tissier de Mallerais, assisté de l’abbé
Schmidberger et de l’abbé de Cacqueray, supérieur du District de
France de la Fraternité Saint-Pie X.
La
cérémonie d’abjuration a eu lieu avant la messe. Après un discours de
présentation fait par Mgr Tissier de Mallerais, le Pasteur Sandmark s’est
agenouillé devant l’évêque et a prononcé une Professio fidei
qui était à la fois une abjuration solennelle de ses erreurs de jadis et
une profession solennelle de la foi catholique (texte complet ci-joint).
Puis son compagnon a fait de même.
Après
le chant du Miserere (le Psaume 50), Mgr Tissier de Mallerais a
absout les deux convertis des peines canoniques qui frappent les
hérétiques et les schismatiques. Puis il leur a conféré le sacrement
de confirmation, avant qu’ils ne reçoivent la communion au cours de la
messe qui a suivi.
Cette
cérémonie, solennelle et émouvante, s’est déroulée dans une église
bondée. C’est la première fois qu’une cérémonie publique d’abjuration
par un pasteur protestant avait lieu dans une église de la FSSPX.
“L’Eglise
conciliaire empêche les conversions” a déclaré Mgr Tissier de
Mallerais dans son discours d’ouverture de la cérémonie. L’expression,
polémique, est exagérée. En revanche, il est vrai que la cérémonie d’abjuration
telle qu’elle s’est déroulée hier à Saint-Nicolas-du-Chardonnet n’existe
plus dans ce que Mgr Tissier de Mallerais appelle “l’Eglise
conciliaire”. En témoignent les conversions des pasteurs Max Thurian et
Roger Schutz, les deux fondateurs de la Communauté de Taizé.
La
conversion du pasteur Roger Schutz
Ces
conversions se sont accomplies dans une telle discrétion qu’elles ont
été connues non au moment où elles se sont produites mais à l’occasion
d’autres événements. C’est quand l’ordination sacerdotale de Max
Thurian a été rendue publique en 1988 (ordination célébrée par l’archevêque
de Naples l’année précédente), que sa conversion au catholicisme a
été connue. C’est quand Roger Schutz a reçu la communion au cours des
obsèques de Jean-Paul II, en avril 2005, que l’on a supputé son
appartenance à l’Eglise catholique. La chose fut si surprenante que le
cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, après les obsèques, a
interpellé le cardinal Kasper, Président du Conseil pontifical pour la
promotion de l’Unité des chrétiens, sur cette communion urbi et
orbi. Tout le monde, ou presque, croyait Frère Roger encore
protestant. Le cardinal Kasper a répondu : « Frère Roger est
formellement catholique ».
Après
avoir interrogé l’évêché d’Autun, le Conseil pontifical pour
l’Unité des chrétiens et le Prieur de la Communauté de Taizé, on
peut essayer d’établir l’itinéraire de la conversion, discrète, de
Roger Schutz.
La
communauté semi-monastique que le Pasteur Schutz a fondée, en 1940, à
Taizé, communauté vouée au rapprochement entre les chrétiens, n’a
compté, au départ, que des protestants. À partir de 1949, Roger
Schutz et Max Thurian ont été reçus régulièrement au Vatican, par Mgr
Montini d’abord (le futur Paul VI), puis par les papes eux-mêmes
à partir de Jean XXIII. Les deux pasteurs de Taizé furent parmi les
« observateurs » non-catholiques invités au concile Vatican
II, dès la première session (1962). Max Thurian sera aussi, à partir de
1966, parmi les six observateurs non-catholiques au Consilium
chargé de préparer les réformes liturgiques qui aboutiront, notamment,
à la promulgation d’un Novus Ordo Missæ.
À
partir de 1969, la Communauté de Taizé a accueilli des
« frères » catholiques puis, en 1971, un accord fut trouvé
pour instituer un « représentant » de la Communauté de
Taizé auprès du Saint-Siège. Ce « représentant » avait
comme mission « de traiter les questions communes entre Taizé et l’Eglise
catholique en harmonie avec la pensée du Saint-Père ; de permettre
une meilleure collaboration dans les activités œcuméniques entre Taizé
et l’Eglise catholique ; et de favoriser l’établissement de
liens organiques entre elles ».
Cet
accord, rendu public à l’époque (L’Osservatore romano, 9-10
août 1971), préparait en fait, semble-t-il, le passage à l’Eglise
catholique des deux fondateurs de Taizé, Roger Schutz et Max Thurian. Ce
« passage », cette conversion, se firent en 1972, dans la
chapelle de l’évêché d’Autun, diocèse où se trouve Taizé. Il y
eut profession de la foi catholique puis communion des mains de Mgr Le
Bourgeois.
Aucun
acte écrit ne reste, semble-t-il, de cet événement mais Frère Roger a
donné le témoignage oral de cette adhésion à la Foi catholique au
successeur de Mgr Le Bourgeois, Mgr Séguy.
Par
la suite, des pratiques catholiques, comme l’adoration eucharistique et
le sacrement de la confession, seront établies dans la Communauté de
Taizé. Roger Schutz, devenu catholique, n’a plus, évidemment, célébré
le culte protestant à Taizé ou ailleurs et, puisqu’il n’était pas
devenu prêtre, il recevait la communion d’un prêtre catholique.
« Pour ce qui est du ministère du Pape, il déclarait et écrivait
que l’unité des chrétiens devait se faire autour du pasteur de l’Eglise
du Christ, qu’est l’évêque de Rome ».
Roger
Schutz aimait à dire : « J’ai trouvé ma propre identité de
chrétien en réconciliant en moi-même la foi de mes origines avec le
mystère de la foi catholique, sans rupture de communion avec
quiconque » (allocution au pape Jean-Paul II, en 1980, lors de la
Rencontre européenne des jeunes à Rome). La formule, reprise encore
dans son dernier livre (Dieu ne peut qu’aimer), peut-être jugée
très insatisfaisante parce qu’elle ne dit rien des rétractations
nécessaires à une conversion. Mais Roger Schutz n’était pas un
théologien.
Il
est vrai que la discrétion de sa conversion n’a pas eu la limpidité et
la solennité d’une abjuration. Mais qui oserait douter de sa
sincérité ? Le cardinal Ratzinger, en lui donnant la communion en
avril 2005, avait agi, bien sûr, en connaissance de cause. Et c’est
être mal informé que de l’accuser, aujourd’hui encore, d’ « avoir
donné la communion à un protestant ».
Annexes
Déclaration
publique du pasteur Sten Sandmark à l'occasion de son entrée dans
l'Eglise Catholique
Veritas
liberabit vos - La Vérité vous rendra libre (Joan VIII,32)
Pourquoi
mon retour à l'Eglise de mes pères d'avant 1517?
Il
n'y a qu'un seul Dieu, qui s'est révélé lui-même comme le Dieu tri ne
: le Père, le Fils qu'Il a engendré, et le Saint-Esprit qui
procède des deux. Le Fils de Dieu a été envoyé dans le monde et s'est
fait homme pour nous racheter du péché et de la mort par son sacrifice
sur la Croix. Il a fondé l'Eglise, qu'Il a établie sur Pierre (Matth.
XVI, 16-19), afin que, après sa Résurrection et son Ascension, elle
poursuive Son œuvre de Rédemption dans le temps et dans l'espace par la
prédication de l'Evangile, l'offrande du Saint Sacrifice de la Messe,
l'administration des sept sacrements et la mission pastorale qu'Il lui a
confiée lorsqu'Il a dit: « Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous
envoie.» (Joan. XX, 21)
De
même donc qu'il n'y a qu'un seul Dieu, de même n'y a-t-il qu'un seul
Sauveur,Notre-Seigneur Jésus-Christ; ainsi il n'existe qu'une seule
Eglise qu'Il a fondée, Lui l'Homme-Dieu: l'Eglise une, sainte, catholique
et apostolique; elle est le Corps mystique du Seigneur Lui-même (1 Cor.
XII, 27).
Seul
Pierre a reçu du Seigneur le mandat de La paître (Joan. XXI, 15-17).
C'est lui qui a établi l'Eglise à Rome et y a souffert le martyre, et
qui trouve son successeur légitime dans le Souverain Pontife romain.
L'appartenance
à cette Eglise est de nécessité de salut: « Celui qui vous écoute,
m'écoute; celui qui vous méprise, me méprise. Mais celui qui me
méprise, méprise Celui qui m'a envoyé» (Luc X,16).
Pour
son propre malheur, c'est en 1517 que Luther s'est séparé de cette
Eglise, tant dans son enseignement que dans son culte ou sa discipline, et
qu'il a entraîné des nations entières dans cette funeste séparation.
Par la suite, et dans le sillage de cette déchirure, d'innombrables
sectes se sont formées qui toutes se réclament du Christ, mais dont
aucune ne peut se prévaloir de remonter à Lui par une succession
ininterrompue dans l'unité avec le successeur de Pierre, pas même
l'Eglise de Suède. L'ordination de femmes comme « prêtresses» ainsi
que la bénédiction accordée aux unions homosexuelles montrent à
l'envie combien cette dernière s'est éloignée de la mission du Christ
et de l’enseignement des apôtres.
Après
de nombreuses années de lutte et beaucoup de prières, je quitte cette
communauté pour revenir à l'Eglise fondée par le Christ, à l'Epouse de
l'Agneau immolé, même si cette Eglise est aujourd'hui secouée par une
grave crise. C'est à Elle et Elle seule que le Christ a confié sa
promesse que les portes de l'enfer ne prévaudront point contre Elle (Matth.
XVI, 18).
Je
me recommande à la prière de tous les chrétiens et prie moi-même pour
que tous trouvent dans le troupeau du Christ le refuge et finalement le
salut éternel. Cette prière débordante d'espérance,je l'adresse de
manière toute particulière à Marie, la Mère de Dieu fait homme,
modèle de l'Eglise en son Immaculée Conception et sa Virginité. Sainte
Brigitte, vous la femme forte de l'unique Eglise unie à Rome, priez pour
votre patrie et la mienne, la Suède!
Oskarshamn,
le 16 juillet 2006
Sten
Sandmark
Profession
Fidei
Moi,
N.N... , ayant devant les yeux les Saints Evangiles, que je touche de mes
propres mains, je reconnais que personne ne peut être sauvé en dehors de
la Foi que professe, croit, prêche et enseigne la sainte Eglise
catholique apostolique et romaine; je regrette vivement d'avoir erré
gravement contre cette foi, parce que, né hors de l'Eglise Catholique,
j'ai reçu et admis des doctrines contraires à son enseignement.
Maintenant,
éclairé par la grâce divine, je fais profession de croire que la sainte
Eglise catholique, apostolique et romaine, est la seule véritable Eglise
établie par Jésus-Christ sur cette terre, et je me soumets à elle de
tout cœur. Je crois tous les articles qu'elle propose à ma croyance; je
réprouve et condamne tout ce qu'elle réprouve et condamne, et je suis
prêt à observer tout ce qu'elle me commande. En particulier, je fais
profession de croire:
Un
seul Dieu en trois personnes divines, distinctes et égales, à savoir: Le
Père, le Fils et le Saint-Esprit ;
la
doctrine catholique sur l'Incarnation, la Passion, la Mort et la
Résurrection de Notre-Seigneur Jésus-Christ; l'union hypostatique des
deux natures, divine et humaine; la maternité divine de Marie, en même
temps que sa virginité sans tache et son immaculée conception;
la
présence véritable, réelle et substantielle du corps, joint à l'âme
et à la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, au Très Saint
Sacrement de l'Eucharistie;
les
sept Sacrements institués par Jésus-Christ pour le salut du genre
humain, à savoir: le baptême, la confirmation, l'eucharistie, la
pénitence, l'extrême-onction, l'ordre et le mariage;
le
purgatoire, la résurrection des morts, la vie éternelle;
la
primauté, non seulement d'honneur, mais aussi de juridiction, du Pontife
Romain, successeur de saint Pierre, prince des Apôtres et Vicaire de
Jésus-Christ;
le
culte des saints et de leurs images;
l'autorité
des traditions apostoliques et ecclésiastiques, et des Saintes Ecritures,
qui ne doivent être interprétées et entendues que dans le sens qu'a
adopté et adopte notre Mère la sainte Eglise Catholique;
et
tout ce qui a été en outre défini et déclaré par les saints canons et
les conciles œcuméniques, spécialement par le saint concile de Trente
et celui du Vatican.
C'est
pourquoi, d'un cœur sincère et d'une foi ferme,je déteste et abjure
toute erreur, hérésie et secte contraires à cette sainte Eglise
catholique, apostolique et romaine. Que Dieu me soit en aide ainsi que les
Saints Evangiles que je touche de mes propres mains ! |