Nouvelles de Rome
- par Yves Chiron
On
lit, ici et là, que les jours de la Commission Ecclesia
Dei sont comptés, que certains cardinaux et évêques français en désaccord
avec la récente levée des excommunications des évêques de la FSSPX ont
obtenu « la tête » (sic) du cardinal Castrillón Hoyos président
de la Commission, que la dite-Commission serait bientôt placée « sous la
tutelle de la Congrégation pour la doctrine de la Foi », signe du désaveu
de la commission Ecclesia Dei et de
son président.
De
différentes conversations romaines avec certaines des personnes qui sont en
charge de ces dossiers, ou qui auraient pu l’être, on peut apporter les précisions
suivantes :
•
Le cardinal Castrillón Hoyos aura quatre-vingts ans en juillet prochain. Il a
largement dépassé la limite d’âge fixée par le Règlement
général de la Curie romaine pour les chefs de dicastère (à 75 ans, ils
sont « priés de présenter leur démission au Souverain Pontife »
qui l’accepte ou non et peut les conserver en fonction jusqu’à l’âge de
quatre-vingts ans).
•
Mgr Perl, le plus ancien membre de la Commission Ecclesia Dei, a d’abord été
attuario de cette Commission, puis
secrétaire. En mars 2008, il en a été nommé vice-président. Cette promotion
récompense, très certainement, ses mérites, mais elle est aussi un gage de
stabilité dans sa délicate mission : Mgr Perl a atteint soixante-dix ans
en 2008, sa nomination comme vice-président repousse à soixante-quinze ans son
départ à la retraite.
•
Les multiples accusations de modernisme portées par certains évêques de la FSSPX contre Benoît XVI ont été
jugées très sévèrement à Rome.
Rappelons-les
brièvement :
-
Mgr de Galaretta, dans le sermon prononcé à Écône lors de la cérémonie des
ordinations, le 27 juin dernier, a dénoncé dans les discours du Pape aux
Etats-Unis : un « esprit naturaliste, humaniste, qui n’est pas à
proprement parler surnaturel, mais plutôt humain. […] Oui, ces autorités
romaines font une œuvre de déchristianisation […] elles adhèrent à des
principes libéraux modernistes ».
-
Au même moment, dans un entretien accordé à la revue américaine The Angelus, Mgr Tissier de Mallerais décrivait Benoît XVI comme
« un vrai moderniste, avec la théorie complète du modernisme mis à jour ».
-
Plus récemment, dans une étude parue en janvier,
Mgr Tissier de Mallerais, a dénoncé la « diabolique dialectique »
de Benoît XVI, où « les affirmations sont justes, mais ce sont les négations
qui sont hérétiques. Ainsi ont procédé tous les hérésiarques ».
•
Les discussions doctrinales avec la FSSPX seront menées sous la direction
d’une nouvelle commission qui va être créée et qui dépendra de la Congrégation
pour la doctrine de la Foi. Cette décision de créer une nouvelle commission
n’est en rien une défiance à l’égard de la Commission Ecclesia Dei. Les questions doctrinales n’ont jamais été du
ressort de la Commission Ecclesia Dei, ni
non plus, de manière spécifique, les relations avec la FSSPX. Mgr Fellay ne
s’est rendu qu’une fois dans ses locaux, le 4 juin dernier.
• La
FSSPX semble peu pressée d’ouvrir les discussions doctrinales relatives aux
points du concile Vatican II qui posent problème. Du côté romain, la future
commission doctrinale recourra, notamment, à des théologiens français et
italiens, pour certains membres déjà de la Commission théologique
internationale. En revanche, certains théologiens pressentis ont refusé parce
que le principe théologique de telles discussions est mal défini.
Guillaume
de Tanoüarn - Jonas
ou le désir absent
(Éditions
Via Romana, 111 pages, 14 euros)
L’abbé
de Tanoüarn est un écrivain abondant, surprenant parfois par ses références
à la littérature classique ou contemporaine. Sa façon d’écrire et
d’aborder les problèmes le rapproche plus d’un Balthasar que des grands
représentants de l’École romaine de théologie (un abbé Berto ou un abbé
Lefèvre jadis, un Mgr Piolanti hier, un Mgr Gherardini aujourd’hui).
Son
dernier livre ne déroge pas à sa manière de conduire son lecteur sur des
chemins originaux. C’est une lecture accompagnée du livre biblique de Jonas.
Le
prologue (« Mon apocalypse du désir ») est un clin d’œil à
Boutang, non nommé, et les démonstrations n’en sont pas, pourquoi ne pas le
dire, toujours convaincantes. Après la satisfaction du désir, il ne resterait
« rien » : que la « satisfaction », l’« autoréalisation ». On
pourrait en débattre.
Mais
le fond du livre est ailleurs. Il est dans la lecture des aventures de Jonas
comme un enseignement sur l’absence de désir. C’est « un manque de
confiance en Dieu qui pourrit la vie de Jonas et qui en fait un fugitif et un
vagabond sur la terre » (p. 43-44). Puis, au milieu de la tempête, il va
s’offrir « en un sacrifice propitiatoire, en un sacrifice capable
d’apaiser le Dieu tout-puissant ». Ce sacrifice le sauve. Mais sa
mission ne fait que commencer. Il doit appeler les Ninivites à la pénitence.
Les
pages de l’abbé de Tanoüarn sur l’universalisme de l’appel de Dieu et
sur l’universalisme du salut sont belles et réconfortantes. « Dieu a
une volonté d’amour qui tient compte du moindre Bien accompli. Dieu se
reconnaît, Lui l’auteur de tout bien, dans le plus petit élan vers le bien.
Si c’est un élan sincère ».
Y.C.
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