Après
le discours du Latran - par
Emile Poulat
Article
paru dans l’hebdomadaire France Catholique (60 rue de Fontenay,
92350 Le Plessis-Robinson), le 11 janvier 2008.
Ce
n’est pas à moi d’expliquer au pape Benoît XVI et au président
Sarkozy ce qu’ils doivent penser, dire ou faire. D’ailleurs, ils ne me
le demandent pas. Je me sentirais trop comme Grosjean voulant en remontrer
à son curé ou à son instituteur. En revanche, à moi ou à nous, il
nous appartient de les écouter, ce mot à double sens : les suivre
et leur obéir, mais d’abord les entendre et les comprendre. C’est
donc par là que je commencerai.
Nicolas
Sarkozy a donc rendu visite à Rome à Benoît XVI. Cela fait trois points
distincts : le voyage, le programme, le discours.
1/
Le voyage
Le
Saint-Siège est la première puissance avec laquelle, depuis le XVe
siècle, la France entretient des relations diplomatiques. Ces relations
ont été interrompues pendant la Révolution française, reprises par
Bonaparte, et rompues – seule et unique fois – par la IIIe République
de 1904 à 1921.
Le
voyage du chef de l’État nouvellement élu s’inscrit donc dans la
meilleure tradition diplomatique. Ce qui est nouveau, c’est le
style : d’une part, la suite bigarrée qui l’accompagnait ;
d’autre part le rythme accéléré du programme de moins de vingt-quatre
heures et avec les occupations parallèles (un dîner avec les chefs de
gouvernement italien et espagnol).
2/
Le programme
Le
programme comportait deux moments forts : une audience privée du
Pape – courte, vingt-cinq minutes -, une cérémonie en la
basilique Saint-Jean de Latran, cathédrale du Pape, où Nicolas Sarkozy a
été accueilli par le chapitre des chanoines pour y prendre possession de
la stalle de « premier et unique chanoine d’honneur », titre
transmissible décerné à Henri IV pour sa générosité envers le
chapitre. En réalité, la « stalle » est un fauteuil au
milieu du chœur, montrant bien ainsi que, parmi les chanoines, ce laïc n’est
pas l’un des leurs, même si, traditionnellement, une stalle est
réservée à un chanoine français (présentement Mgr Louis
Duval-Arnould) pour le représenter.
Il
semble bien que, depuis la fin de l’Ancien Régime, et peut-être même
avant, la prise de possession soit tombée en désuétude. Elle a été
relevée par la Ve République, comme un signe des bonnes dispositions de
la France envers le Saint-Siège, à une heure où celui-ci occupait une
place croissante sur la scène internationale. Nous sommes dans l’ordre
de l’honorifique et du symbolique, sans aucune confusion des rôles et
des plans, et selon un usage dont on trouverait bien des équivalents dans
la société civile.
3/
Le discours
Ce
qui a fait mouche et a ouvert le débat, c’est le discours prononcé par
le président de la République à l’occasion de sa prise de possession,
d’autant plus que ce discours s’inscrivait dans le prolongement du
livre d’entretiens La République, les religions, l’espérance1.
Ce
discours est donc à deux faces : la laïcité, la religion. Sur la
laïcité, il a fait bondir la gauche laïque et même le centre
(François Bayrou) rallié à la laïcité, et on peut se demander si c’est
bien toujours à bon escient. Sur la religion, il a ravi les autorités
romaines, et on peut se demander si ce n’est pas imprudence ou
précipitation : la satisfaction était de circonstance, et donc s’imposait,
mais à quoi allait-elle ?
Sur
ces deux thèmes, la nouveauté du ton était indéniable, dans le style
du président. Il y avait, dans le propos, une chaleur inhabituelle et une
formule nouvelle : laïcité positive. Deux questions se
posent aussitôt : n’était-ce pas déjà en France la réalité
progressivement établie ? Et, si notre société peut faire mieux en
ce domaine, que peut-on attendre de cette déclaration d’intention ?
Deux
distinctions capitales s’imposent ici si l’on veut sortir de la
confusion habituelle qui alimente les débats. La première est entre deux
ordres de réalités : la laïcité qui habite chacun d’entre nous,
la laïcité qui nous gouverne tous. La seconde est entre deux notions qui
ne s’équivalent pas : laïcité et séparation.
La
laïcité qui nous habite, c’est l’idée que chacun de nous est libre
de s’en faire et sur laquelle se sont longtemps affrontées les familles
de pensée, sans qu’on puisse considérer l’opposition comme
surmontée et la discussion comme close. La laïcité qui nous gouverne
– Notre laïcité publique2 – c’est le régime
juridique et administratif progressivement mis en place, de la IIIe à la
Ve République, un régime qui s’impose, à la fois par la force de la
loi et par la satisfaction qu’il procure généralement dans son
ensemble.
Ce
régime représente bien aujourd’hui une réalité positive, qui n’exclut
personne et qui intègre les religions. S’il y a des aspirations et des
contentieux, leur domaine est limité et mineur. Personne ne songe à le
remettre en cause radicalement. Laïcité positive, qui ne s’en
réjouirait ? Objection : si elle n’était que positive, tout
irait bien, mais elle renvoie à une laïcité négative et à ses
partisans, qu’elle condamne et qui, justement vivaient leur idée de la
laïcité comme positive. Comment ne pas raviver « la guerre des
deux France » ? Autre objection, sémantique et
inextricable : ajouter un adjectif, c’est changer le sens du
substantif. Mais alors, pourquoi opposer à cette
« laïcité » positive la « laïcité
républicaine » ? Et parler simplement de « la
laïcité » devient vite incantatoire, comme de parler de « la
modernité » ou de « la liberté ».
Voici
pourtant vingt-cinq ans que la Ligue de l’Enseignement a mis à son
programme une recherche et une réflexion sur l’histoire et sur la mise
en œuvre de notre laïcité française. Elle avait parlé, certes, non de
laïcité positive, mais de laïcité ouverte, puis de laïcité
plurielle. Entre la Ligue et le Président, c’est le tunnel du
Mont-Blanc en percement, son ouverture par les deux bouts, en attendant l’heure
de se rencontrer si chacun a calculé juste, un travail ingrat mais
gratifiant loin du ciel des idées pures. C’est ce travail qui oblige à
distinguer clairement laïcité et séparation des Églises et de l’État.
Quand François Bayrou explique qu’il s’en tient à la laïcité de
Jules Ferry3, c’est un peu court, pour deux raisons :
parce que la laïcité ne se limite pas aux lois scolaires, et parce que,
si la laïcité commence avec Jules Ferry, elle ne s’arrête pas avec
lui.
Notre
régime de laïcité publique s’enracine pour l’essentiel dans une
période de vingt-cinq ans : des lois scolaires (1881-1886) à une
loi cultuelle (1905) « concernant la séparation des Églises et de
l’État ». Ces deux bornes ont été à l’origine d’un grave
conflit avec l’Église catholique : deux conflits réglés - ou
plutôt apurés en 1923-1924 pour le culte4, en 1959, par la
loi Debré, pour l’enseignement.
La
République est devenue constitutionnellement « laïque » en
1945 par la volonté commune d’un gouvernement tripartite (communistes,
socialistes, démocrates-chrétiens) et en 1958 par la volonté d’une
majorité gaulliste, sans que soit définie cette
« laïcité », sans que soit assuré un accord sur une même
acception. Des progrès sont nécessaires et peuvent être escomptés en
vue d’une clarification, mais devant ce flou persistant, on comprend que
le Saint-Siège n’ait pas les idées plus claires et demeure perplexe,
tout en ayant sa propre idée d’une « vraie et saine
laïcité ». Il reste que nous sommes bien parvenus à un régime
apaisé, ouvert, pluriel, positif. C’est de lui qu’il peut sortir, si
on l’estime possible et souhaitable, de nouvelles avancées.
L’État
n’est pas devenu plus laïque grâce à la loi de 1905, simplement un
peu moins sacristain. Il administrait à son échelle le temporel de
quatre cultes reconnus : il y renonce au profit d’une entière
liberté reconnue à tous les cultes. En ce sens, c’est la République
qui est devenue plus laïque, puisqu’elle ne privilégie plus aucun
« culte ». Et pourtant, on bute sur un obstacle
inattendu : les sectes, en même temps qu’on dut découvrir une
frontière incertaine entre culte et culture.
En
1905, le législateur a reculé devant une séparation intégrale. Il
aurait pour cela fallu faire à l’Église catholique un
« cadeau » - un cadeau empoisonné – et il s’y est
refusé : lui rendre les 40.000 églises et chapelles nationalisées
en 1789 et, depuis 1802, affectées à l’exercice du culte catholique.
Au sein de la laïcité, la loi de 1905 est de nature hautement
symbolique, mais son dispositif est singulièrement limité : elle se
borne à supprimer le service public du culte, le budget des cultes et l’administration
des cultes chargée de gérer ce budget et ce service. Elle a été
modifiée une vingtaine de fois – la première moins d’un an après sa
promulgation – selon une dizaine de critères. Elle appelle d’urgence
une édition critique : sa version dite « consolidée »
publiée officiellement est loin d’être satisfaisante. Faut-il encore
la modifier ou la compléter ? Il faut d’abord la lire et bien la
lire. La loi de 1905 a été condamnée par le pape Pie X et, à nouveau,
par le pape Pie XI qui en a pourtant autorisé l’usage sans que le
gouvernement ait accepté de la modifier. Elle a donc été condamnée
tout en étant acceptée par l’épiscopat français et par le
Saint-Siège. L’essentiel n’est pas d’ergoter sur le mot
séparation, mais de suivre le Conseil d’État qui, dès mars 1906, a
établi que la majorité parlementaire avait écarté une loi de combat au
profit d’une loi de liberté : une liberté comme l’Église n’en
avait jamais connu au cours de l’histoire de France. Et, d’une
certaine manière, c’est bien ce qui faisait la difficulté : ni l’État,
ni l’Église, ni personne n’avait l’expérience de cette liberté
où il fallait s’engouffrer, sans savoir où elle menait.
Depuis
un siècle, l’Église a donc toute liberté d’occuper tout l’espace
public dont elle est capable. Traduit dans son langage, l’article 1er de
la loi de 1905 assure la libertas conscientiarum et garantit la libertas
Ecclesiæ en matière de culture, indépendamment des lois qui lui
ouvrent libéralement accès à tout le champ des libertés publiques
(presse, enseignement, association, réunion, syndicats, etc.) à une
exception près, levée en 1942 : les congrégations. On dira qu’il
ne faut rien idéaliser. Il faut plutôt éviter de confondre. Tout bien
décanté avec le temps, si l’Église a eu à souffrir, ce n’est pas
du nouvel état de droit mais du mouvement de la société. La loi de 1905
pouvait modifier le rapport de la puissance publique et de l’Église
catholique : elle était le produit d’un rapport de forces sociales
qu’elle n’avait pas le pouvoir de modifier, moins encore d’inverser.
Dès lors, deux questions vont se poser à l’Église : la liberté
pour quoi faire ? Et la liberté dans quelle situation ?
Le
laïcisme n’a jamais désarmé et l’Église l’a toujours
dénoncé : aussi agissant qu’on le suppose, il n’a jamais
entamé le régime juridique issu des « lois laïques ». Mais
surtout, il est à double face comme Janus : fils de la philosophie
des Lumières et marqué à gauche ; fils de l’économie libérale
et de la sécularisation des activités humaines, marqué à droite. Un
exemple : les premiers ont supprimé le repos dominical, remplacé
par le repos hebdomadaire fixé le dimanche, et ce sont les seconds qui
réclament le dimanche jour ouvré, malgré les Églises et les syndicats.
C’est
dans cet environnement défavorable, à régime juridique constant (sauf
corrections successives toutes favorables), que l’Église va devoir
exercer sa nouvelle liberté et faire l’apprentissage des possibilités
qu’elles lui ouvrent. Et ceci sur deux registres bien distincts :
la vie paroissiale dans le cadre diocésain, comme toujours ; depuis
la Révolution française, un projet de restauration chrétienne de la
société (« chrétienté profane », selon Jacques
Maritain ; « royauté sociale » de Jésus-Christ sur les
individus, les familles et les nations, selon Pie XI).
Chacun
peut voir ce qu’il en est advenu : baisse continue des statistiques
de pratique religieuse et de la fréquentation des Eglises ;
affaissement de la catéchisation des enfants, des patronages et des
mouvements de jeunesse catholique (à l’exception du scoutisme) ;
rupture culturelle des jeunes générations ; sécularisation des
organisations d’étiquette ou d’inspiration catholique ;
révolution des mœurs (cohabitation juvénile, sexualité précoce,
contraception, avortement, divorce, pacs, homosexualité revendiquée,
pornographie généralisée, drogue banalisée, pédophilie, perspectives
ouvertes par la génétique, etc.) L’Église n’a plus les moyens de
son projet et ne les retrouvera pas, sans disposer d’un projet de
remplacement, sans même une analyse et une réflexion sur les raisons de
cette rapide transformation du paysage. L’Église de France reste
pourtant d’une grande vitalité et d’une forte créativité, mais en
tous sens, et avec une portée limitée, dans le prolongement de ce qu’au
XIXe siècle, on appelait « les industries du zèle », sans
dissiper les inquiétudes.
On
comprend que, dans cette situation, l’appel romain de Nicolas Sarkozy à
l’Église catholique et aux catholiques de France ait été accueilli
par des applaudissements et qu’il ait « fait mouche » parmi
les cardinaux « buvant du petit lait »5 . On
comprend qu’il ait irrité les « laïques » comme une
entorse à la laïcité.
Le
Président voulait taper fort, au risque de taper trop fort, pour frapper
l’opinion. Il a réussi. Il ne pouvait choisir meilleur moment, à l’heure
où l’Église de France se montre soucieuse de sa visibilité, d’une
plus grande visibilité, et s’interroge sur les voies à prendre, en
réaction contre ceux des siens qui lui expliquaient qu’elle n’était
plus qu’une minorité et qu’elle devait se faire modeste.
Pour
une part, je trouve ce débat interne fallacieux. Je repense au débat
ouvert par Maurice Druon en 1972, Une Église qui se trompe de siècle.
Je pense qu’elle se trompe de cible. La question fondamentale pour elle
n’est pas d’être visible, mais d’être audible, en sachant qu’il
ne suffit pas de parler pour être entendu, mais qu’il faut trouver l’oreille
d’autrui et lui dire des choses pour lui pertinentes.
En
outre, elle sous-estime sa visibilité présente, qu’elle devrait
apprendre à mieux mesurer. Je ne peux ici développer mais, aussi
étonnant que cela puisse paraître, après l’État, aucune organisation
ne dispose – et de loin – de moyens équivalents. Sera-t-elle en
mesure de répondre à l’appel présidentiel plus qu’elle ne fait
aujourd’hui ? On peut le souhaiter sans discerner clairement la
réponse. Et l’on ne peut oublier les deux freins qui pèsent sur cette
réponse : la crainte de l’Église d’être instrumentalisée, et
la persistance d’importantes divergences (en tête l’immigration, la
bioéthique, la famille et le travail dominical). Il suffit de se souvenir
que l’Église de France et le Saint-Siège ne sont toujours pas clairs
avec la loi de 1905 – qui demeure condamnée – et avec les
associations cultuelles qu’elle a instituées, et moins encore avec l’idée
de laïcité.
Sur
ce point, le discours présidentiel du Latran risque, en effet, d’accroître
la confusion plutôt que de la dissiper. Le ton nouveau qu’il a adopté
peut avoir un effet, limité, sur l’opinion publique : il ne change
rien à l’ordre existant. Jean-Pierre Raffarin l’a expliqué sans
équivoque : « la société française ne peut accepter qu’une
religion tente de lui imposer un projet politique.6 »
Il
faut en être conscient – et c’est sans doute là le vrai
« tournant » - Nicolas Sarkozy ne fait que dire enfin tout
haut ce qui se pratique au quotidien sans phrases, malgré les
représentations contradictoires, éloignées de la réalité, que peuvent
s’en faire des catholiques et des laïques. Ce qu’il dit n’est que
la tardive reconnaissance publique du caractère libéral de notre régime
de laïcité et de sa pratique depuis un siècle. Désormais, il y aura
contradiction et même hypocrisie si l’on n’accorde pas ce qu’on
pense de la laïcité et ce qui est fait un peu partout.
Si
l’on voit, dans le discours du Latran, une atteinte ou une menace pour
la laïcité, il faut aussi dénoncer le maire socialiste de
Villiers-le-Bel après les violences qu’a subies sa commune, déclarant
aux associations et aux religions : « J’ai besoin de
vous »7. Il faut dénoncer Lionel Jospin qui, en 2002, a
institué une rencontre annuelle entre le gouvernement et l’épiscopat.
Il faut dénoncer Vincent Auriol qui, en 1947, a rétabli la présentation
à l’Élysée des vœux des cultes anciennement reconnus, supprimée en
1905. Il faut dénoncer tous les recours de la puissance publique à l’aide
des organisations d’étiquette ou d’inspiration confessionnelles.
L’appel
du Latran laisse en l’état le statut des cultes et de ses ministres.
Les religions ne redeviennent pas un service public. La loi de 1905 lui
ouvre les portes du monde associatif sur un mode particulier, de droit
privé. L’appel aux associations a précédé l’appel aux religions.
La
religion se perd, et elle n’est plus ce qu’elle était, mais il nous
faut apprendre à voir qu’elle occupe encore une place considérable
dans l’espace public, et en grande partie du fait de l’Église
catholique. La Raison, organe de la Libre-Pensée, s’est
récemment plaint que l’agenda de Michèle Alliot-Marie, ministre de l’Intérieur
chargée des cultes, ne lui permette pas de recevoir ses représentants,
alors qu’elle trouve largement le temps de recevoir et de visiter les
autorités religieuses8.
Il
faut bien le constater : le ministre sait ce qu’elle peut demander
aux grandes religions sur le terrain social, tandis qu’elle n’attend
rien en ce domaine de la Libre Pensée.
Il
était bien temps de le reconnaître publiquement et d’en tirer les
conséquences, ou alors c’est un siècle de régime libéral et de
pratique libérale de la laïcité qu’il faut remettre en cause. Il faut
aussi reconnaître le long chemin à parcourir, au sein de la société
française, pour qu’elle soit au clair avec la laïcité qu’elle s’est
donnée.
Je
n’ai pas abordé l’Europe et ses racines chrétiennes. C’est devenu
un véritable cactus, un débat mal engagé où les sensibilités l’emportent
sur la raison. Je m’en tiendrai à la remarque de bon sens du cardinal
Jean-Louis Tauran : « Quand on fait un traité, on n’est pas
obligé de faire de l’histoire ; mais quand on fait de l’histoire,
on doit la respecter ».
Reste
un dernier sujet, fondamental : l’espérance. Je ne suis pas
sûr que le Pape et le Président s’en fassent la même idée et que le
mot revête pour eux la même réalité. « L’espérance des
peuples n’est pas dans la foi, mais dans la démocratie et le
droit », écrivait récemment Bernard-Henri Lévy9. Mais
de quelle foi s’agit-il ? Et comment s’articule-t-elle avec notre
condition historique ? Plus qu’un point, grave de désaccord, j’y
vois le lieu d’une réflexion commune à instaurer. « Spe
salvi », sauvés dans l’espérance, cette deuxième
encyclique de Benoît XVI, c’est le point de départ, pour l’Église,
d’une réflexion, d’une redéfinition de son projet pour l’humanité
au XXIe siècle10. |