UN
NOUVEL EVEQUE POUR MONTAUBAN : Mgr BERNARD GINOUX - par Yves Chiron
Le
11 mai, Benoît XVI a nommé l’abbé Bernard Ginoux évêque de
Montauban. Il s’est fait entendre, ici et là, des voix pour dire que,
depuis son élection, les nominations épiscopales effectuées en France
par Benoît XVI – soit depuis plus de deux ans maintenant – avaient
été peu significatives. C’est oublier que la contre-révolution n’est
pas le contraire d’une révolution ; en l’occurrence, Benoît XVI est dans une perspective de restauration et non de rupture.
Par ailleurs, les Papes actuels procédant à plusieurs centaines de
nominations épiscopales par an, il serait naïf de croire qu’ils font,
à chaque fois, un choix personnel et directement informé. Dans le cas de
la France, les filtres, ou les relais si l’on veut, sont nombreux.
La
nomination de Mgr Ginoux est, de ce fait, hautement significative des
évolutions en cours dans l’épiscopat français. Arrive à l’épiscopat
un prêtre qui est loin d’être étranger aux communautés
traditionalistes. Par ses origines (le Vaucluse), par ses liens étroits
avec Mgr Reyne, doyen du Chapitre de la Cathédrale d’Avignon,
il est familier depuis longtemps du Monastère Sainte-Madeleine du Barroux.
Il a même connu la période héroïque, celle de Bédoin, et c’est par
Bernard Ginoux que le signataire de ces lignes a entendu parler pour la
première fois de Dom Gérard et de sa fondation de restauration
bénédictine.
Mgr
Bernard Ginoux est né en 1947 à Avignon. Après des études au collège
jésuite d’Avignon et à la Faculté des Lettres d’Aix-en-Provence, il
a obtenu une maîtrise de Lettres classiques et un CAPES de Lettres
modernes. Il a enseigné au lycée Saint-Joseph de Carpentras, de 1970 à
1980, puis il est entré au Séminaire interdiocésain d’Avignon en
octobre 1980.
Dans
le Séminaire où il entrait, il est arrivé, un jour, que des
séminaristes « s’amusent », dans le foyer, à jouer aux
fléchettes sur un portrait du Pape (Jean-Paul II). C’était un
séminaire où le Supérieur, et professeur d’exégèse, enseignait une
lecture « structuraliste » de l’Ecriture Sainte,
structuralisme très déconstructeur pour la foi. C’était un séminaire
où le professeur de philosophie néo-hégélien – il fera, peu après,
une belle carrière à l’Institut Catholique de Paris et à la Croix
– entraînait complaisamment ses élèves vers les « maîtres du
soupçon ».
Au
secrétariat de l’évêché, situé alors dans les mêmes bâtiments que
le séminaire, la vénérable Pensée catholique de l’abbé
Lefèvre, revue de la « Romanité » s’il en fut, connaissait
un triste sort. Le cher abbé l’envoyait, en plusieurs exemplaires, à
tous les évêques de France. À Avignon, la revue ne franchissait pas les
portes du secrétariat et finissait dans la poubelle, son enveloppe même
pas ouverte.
Rapporter
ces faits, plus d’un quart de siècle plus tard, n’est pas raviver des
querelles obsolètes mais montrer, par un témoignage direct, quelques
traits significatifs de l’état d’esprit d’un lieu de l’Eglise de
France à un moment donné. Sans pour autant réduire tout l’esprit et l’enseignement
du séminaire – et encore moins l’esprit de l’évêque d’Avignon d’alors
– à ces déviances et à ces tristes épisodes.
Bernard
Ginoux, dans les deux années qu’il passa au Séminaire d’Avignon
(1980-1982), sut, en douceur, offrir des munitions intellectuelles et
spirituelles à ses condisciples qui pouvaient être désorientés. Il
diffusa parmi eux, dès sa parution, le gros livre du cardinal Siri, Gethsémani,
qui venait d’être traduit en français, à l’initiative de la
Fraternité de la Très Sainte Vierge Marie. Le cardinal y bataillait
contre l’absolutisme agnostique de Kant, l’historicisation de Dieu, l’herméneutique
réductrice et il n’hésitait pas à ferrailler avec Henri de Lubac,
Karl Rahner ou Jacques Maritain.
Bernard
Ginoux entraînait aussi plusieurs de ses condisciples à de mémorables
soirées de disputationes chez la philosophe Thérèse Lacour qui
développait une « philosophie de la présence » et de l’ « altérité »
propre à rasséréner les jeunes esprits désorientés qu’elle
accueillait.
À
la rentrée de 1982, Bernard Ginoux obtint de son évêque, Mgr Bouchex,
de poursuivre ses études à Rome. En 1986, il passa une licence en
théologie morale à l’Université grégorienne de Rome. Ordonné
prêtre le 29 juin 1986 à Carpentras, il occupa différentes fonctions de
vicaire et d’aumônier dans le diocèse d’Avignon. En 2001, il fut
nommé curé du secteur interparoissial d’Orange et, à partir de l’année
suivante, il fut aussi membre du Conseil épiscopal.
On
signalera encore qu’il a été adhérent du CAL (Comité des Amis du
Lundi), créé pour réclamer le maintien du lundi de Pentecôte comme
jour férié.
Il
est particulièrement attentif aux questions de bioéthique et à la
pastorale des familles et des jeunes. L’abbé Ginoux sera consacré le 2
septembre prochain dans la cathédrale de Montauban.
UN
NOUVEL « EVEQUE » SAUVAGE : Mgr JOSEPH SANTAY
En
mars dernier, Mgr Clarence Kelly, supérieur de la Society of St. Pius
V aux Etats-Unis, a consacré évêque un prêtre qu’il avait
ordonné quelques années auparavant, l’abbé Joseph Santay. Mgr Kelly
avait été lui-même consacré évêque en 1993 par Mgr Mendez, évêque
émérite de Puerto Rico.
Si
Mgr Mendez était un évêque légitime, ni Mgr Kelly ni Mgr Santay n’ont
été consacrés avec le mandat du Souverain Pontife.
La
Société de Saint Pie V est une organisation
sédévacantiste qui a été fondée par d’anciens séminaristes et
prêtres de la Fraternité Saint-Pie V. Outre les deux
« évêques » mentionnés, elle comprend plusieurs prêtres,
un collège (qui accueille une centaine d’élèves) et une congrégation
de religieuses qui compte plusieurs dizaines de membres (les Daughters
of Mary Mother of Our Savior).
Implantée
dans l’état de New-York, la Société de Saint Pie V dessert une
dizaine de lieux de culte à travers les Etats-Unis. Elle estime que le
Saint-Siège est vacant depuis la mort de Pie XII. La liturgie que ses
membres célèbrent est celle du Missel Romain de 1954, antérieur aux
réformes introduites par Jean XXIII (tandis que la plupart des
communautés traditionnelles en France et la Fraternité Saint-Pie X
utilisent le Missel traditionnel dit de 1962).
Y.C. |