REPONSE
A UNE ENQUETE SUR LA FOI - par
Yves Chiron
1.
En dehors même des enseignements du Magistère et de l’éducation que
vous avez reçue, quelles sont les certitudes personnelles qui fondent le
plus votre foi et qui vous aident le mieux à vivre ? Dans quel sens
et vers quels engagements votre foi oriente-t-elle votre vie ?
Hors
des enseignements du Magistère, je me demande quelles
« certitudes personnelles » pourraient être assez fortes
pour « fonder » ma foi. La raison, certes, aide à parvenir
à « une meilleure intelligence du contenu de la foi »
(Jean-Paul II) et des grâces personnelles peuvent alimenter notre foi
et l’éclairer, mais raison et grâces nous ramènent toujours à l’enseignement
du Magistère.
Comment
cette foi oriente-t-elle ma vie ? Vaste question ! Le mot
« orientation » convient bien : pour un catholique la
« vraie vie est ailleurs » – pour reprendre la formule du
poète. Notre passage sur terre n’est qu’un pèlerinage vers l’au-delà,
en quête du salut éternel. Nous sommes tous des mendiants, en attente
du face à face avec Dieu qui est Amour. Tout ce que nous pouvons faire
de bien et de beau sur cette terre ne sera pas perdu, mais récapitulé,
transfiguré et purifié dans la Vie éternelle.
C’est
ce que Balthasar appelle l’ « intégration ».
« L’Intégration c’est le Christ ». Le Christ souverain
jugera « le tout » parce que, par sa mort, « Il a
payé rançon pour le tout ». Il mettra « à l’abri dans l’éternité
de Dieu », tout ce qui, dans notre être et dans notre vie, n’est
pas condamnable.
2.
En tant que croyant avez-vous jamais été ébranlé par le doute ?
Dans quelles circonstances ? Sur quoi ce doute a-t-il porté et
comment y avez-vous répondu ?
Comme
beaucoup d’adolescents, vers 14 ans, j’ai cru avoir perdu la foi. C’est
la lecture, trop précoce, de Nietzsche qui a allumé un incendie
ravageur. Ainsi parlait Zarathoustra et Aurore –
« il y a tant d’aurores qui n’ont pas encore lui » –
me semblaient mettre à jour, de façon irrévocable, la petite misère
intérieure des chrétiens comme « hommes du ressentiment »
et « prêcheurs de mort ».
Les
livres de Nietzsche me paraissaient enseigner un « grand
oui » à la vie, au « grand midi » et aussi ils
signifiaient l’éloignement de Dieu, qui n’est, selon Nietzsche, qu’une
projection de la peur et de l’impuissance des hommes. Mais, en même
temps, j’ai perçu que l’homme Nietzsche – comme il arrive souvent
avec les écrivains – valait beaucoup moins que son œuvre. Il n’a
pas eu une vie apollinienne. Sa vie sentimentale a été un grand échec
et sa fin, dans la folie, a été pitoyable.
Ma
traversée de la nuit a été brève. Dès la classe de Terminale, la
lecture de Gustave Thibon – œuvre facilement abordable pour un
adolescent – et l’enseignement d’un professeur de philosophie
thomiste m’ont fait redécouvrir la foi et m’ont ramené,
progressivement, vers les chemins de l’Eglise.
En
vérité, je comprends aujourd’hui que c’est l’extrême
déficience de ma formation chrétienne antérieure qui avait fait
naufrager, pendant quelque temps, mes maigres certitudes. À cet égard,
je suis un enfant de Vatican II, ou, plus exactement, un enfant de
Vatican II tel qu’il a été vécu, (mal) compris et (faussement)
interprété par une majorité du clergé français. Je ne me souviens
pas avoir appris dans mon enfance – les années 60-70 – un
quelconque catéchisme ; en revanche, j’ai subi, pendant des
années, des heures d’une « catéchèse » plutôt vide et
informe. C’est ce vernis qui avait sauté, très facilement, à la
lecture de Nietzsche.
3.
La notion de vérité se confond-elle pour vous avec Dieu ?
Oui.
« Je suis la Voie, la Vérité et la Vie » a dit le Christ.
Hors de ce chemin, point de salut, au sens chrétien ; point de
lumière complète sur le sens de l’histoire et sur le sens de la vie.
Au bout du chemin, il y a les deux jugements et la vie éternelle :
toutes choses seront alors vues dans leur vraie lumière et jugées et
il y aura « la déification des justes » (selon l’expression
de Mgr Louis Laneau, 1637-1696). De saint Irénée à saint Augustin,
les Pères l’ont dit : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme
devienne Dieu » . Non dans un rapport d’égalité ou d’identification
mais de filiation.
4 .
Est-ce que le rôle fondamental de la religion est de normer les
comportements, c’est-à-dire de fournir une morale ? Peut-on
dissocier religion et morale, c’est-à-dire les traiter comme des
domaines distincts ?
Qu’entend-on
par « morale » ? Pour un chrétien, la morale est la
conformité de l’agir avec ce que l’Eglise définit être le bien et
le bien se résume dans ce qui a été révélé par Dieu dans les Dix
commandements et dans les Béatitudes. La morale n’est, en somme, que
le discernement par l’Eglise de l’application des Dix commandements
et des Béatitudes. Le Catéchisme de l’Eglise Catholique nous
indique comment opérer ce discernement : « La moralité des
actes humains dépend : - de l’objet choisi ; - de la fin
visée ou de l’intention ; - des circonstances de l’action. »
Religion
et morale, en effet, ne peuvent être distinguées parce que la foi est
totalisante. L’agir du chrétien est soumis au regard de Dieu et c’est
au regard de cet Amour et de cette Lumière que le chrétien doit
régler son comportement. Il ne saurait prétendre régler son
comportement seul, être seul juge de lui-même. Dans sa sagesse, l’Eglise
aide, jour après jour, les chrétiens à bien « agir » par
les Dix Commandements, par le Confiteor, par le Catéchisme, par
les enseignements répétés du Magistère.
5.
Certains pensent que l’Eglise n’a pas à régir certains comportements
privés, notamment ceux qui ont trait à la vie conjugale ou sexuelle. D’autres
estiment, au contraire, qu’il appartient à l’Eglise de fournir des
normes dans tous les domaines, afin de défendre le primat de la loi
naturelle. Vous connaissez par ailleurs tous les débats qui se déroulent
actuellement autour des questions de l’avortement, de l’homophobie, de
la parentalité homosexuelle. Quelle est votre position ?
Quelle
« position » un chrétien peut-il avoir sur les questions d’éthique
conjugale ou sexuelle sinon celle de l’Eglise ? La vie conjugale
ou sexuelle est un domaine, ou un aspect, de la vie tout court. Et l’Eglise
a bien pour vocation d’accompagner les chrétiens tout au long de leur
vie. Elle les accompagne par les sacrements, des rites et un
enseignement.
Pourquoi
demander à l’Eglise de bénir une union par le sacrement de mariage
puis prétendre que la façon dont est vécue cette union ne concerne
plus l’Eglise, mais seulement l’individu dans son for intime ?
Cela reviendrait à dire que la vie conjugale ou sexuelle est
indépendante de la vie religieuse, c’est-à-dire, étymologiquement,
de la vie placée sous e regard de Dieu.
La
foi et les mœurs ne sont pas deux domaines distincts. La foi doit
informer, au sens philosophique – donner une forme –, à tous les
actes de la vie. Le sens de notre vie, c’est l’Eternité promise.
Cette Eternité se mérite non comme une récompense mais comme l’accomplissement
d’une promesse, celle du Christ venu nous sauver, c’est-à-dire nous
faire traverser la mort et nous faire entrer dans sa Vie éternelle qui
n’est qu’Amour et Lumière. Mais la promesse du Christ n’est pas
inconditionnelle. Notre libre-arbitre doit y répondre.
La
morale conjugale ou sexuelle n’est donc pas une triste liste d’obligations
et d’interdits mais une des normes de l’agir chrétien tel que le
définit l’Eglise pour une vie en conformité avec la foi. L’Eglise
sait bien qu’en cette matière, comme en d’autres (la charité, l’humilité,
etc.), l’homme est faible et l’Eglise appelle péché les faiblesses
en matière conjugale et sexuelle, comme elle appelle péchés d’autres
faiblesses en d’autres domaines.
6.
Le christianisme a deux mille ans d’existence. Il a traversé des
époques bien différentes qui n’ont pas été sans influencer ses
formes, voire sa doctrine. C’est un constat d’évidence qu’il y a de
très grandes différences entre le christianisme primitif, le
christianisme médiéval, le catholicisme de la Contre-réforme et le
catholicisme de Vatican II. Au-delà de toutes ces évolutions historiques
et sociologiques, quels éléments de permanence apercevez-vous et quels
sont ceux auxquels vous attachez le plus d’importance ?
L’évolution
historique du christianisme n’est que formelle, le kérygme reste
identique. Votre question rejoint celle qui a tant agité le
modernisme : peut-il y avoir une « évolution des
dogmes » ? Les dogmes ne sont pas des
« instruments » qui doivent être reformulés, adaptés
selon les époques, ce sont des définitions dont il y a péril, pour la
foi, de s’écarter. Ce qui ne signifie pas qu’ils ne doivent pas
être, de façon continue, médités, approfondis, interprétés par l’Eglise.
Pour ne prendre qu’un exemple, celui de la Trinité, croit-on que ce
qu’en disent saint Augustin et, près de mille ans plus tard, saint
Thomas, soit moins intelligent, moins pertinent que ce que peut en dire
un théologien du XXe ou du XXIe siècle ?
Je
dirais la même chose de l’agir chrétien. La façon dont a vécu au
XXe siècle saint Padre Pio est-elle si différente de la façon dont a
vécu saint François d’Assise sept siècles plus tôt ? Et saint
François d’Assise n’était-il pas très proche, dans sa façon de
vivre, de la façon de vivre des premiers Apôtres ?
Alors
on peut énumérer facilement les « éléments de
permanence » du christianisme à travers les siècles : le
Credo, les sacrements, la charité en acte, l’aspiration à la vie en
Dieu après le jugement de nos actes.
7.
Le christianisme s’est implanté en Europe, dans un continent qui n’était
pas vierge de croyances religieuses. L’évangélisation de l’Europe a
longtemps été un mélange de luttes contre les croyances et les
pratiques païennes, et de récupération de ces croyances et de ces
pratiques sous une forme chrétienne. Le christianisme historique peut-il,
de ce fait, être considéré comme un « pagano
christianisme » ? Pensez-vous que ce substrat païen de la foi
chrétienne a enrichi le christianisme, ou que celui-ci devrait, au
contraire, aspirer à sa liquidation ?
Autant
le concept de « judéo-christianisme » me semble
fondé pour désigner une période, brève, du début de l’histoire de
l’Eglise, autant celui de « pagano-christianisme » me
semble historiquement fumeux.
Le
milieu d’origine de Jésus est le judaïsme, le livre qui clôt la
Révélation de Dieu – le Nouveau Testament – est l’accomplissement
de l’Ancien Testament hébraïque. Jésus vient accomplir les
prophéties du judaïsme. Il y a eu, à un moment, un
judéo-christianisme.
En
revanche, ce ne sont pas quelques pratiques païennes récupérées par
le christianisme ou la construction d’églises sur d’anciens temples
païens qui permettent de parler d’un « substrat païen de la
foi chrétienne ». Je vois ce phénomène – qui a pu se
répéter, sous différentes formes, en Asie, en Afrique, en Amérique
post-colombienne – comme la capacité, je dirais même la vocation,
intégratrice du christianisme, en tout temps et en tout lieu.
Historiquement,
il y a bien eu une ouverture du christianisme primitif au monde
gréco-romain, il y a bien eu accueil, récupération même, de la
philosophie grecque. Dans le domaine spéculatif, il y a eu une
synthèse entre la raison grecque et la foi chrétienne, mais la
philosophie grecque ne peut être identifiée à un paganisme !
8.
Depuis Vatican II, l’Eglise s’est efforcée d’être plus à l’écoute
des demandes quotidiennes et des nouveaux mouvements sociaux. Certains
estiment que cette « adaptation au monde » est à l’origine
de la désaffection que l’on constate aujourd’hui vis-à-vis de la
religion. D’autres pensent au contraire que, sans cette adaptation, une
Eglise s’en tenant strictement à son enseignement traditionnel
toucherait encore moins les foules ? Qu’en pensez-vous ?
Maurice
Clavel avait eu une formule assez heureuse pour décrire une certaine
« adaptation » de l’Eglise des années 60-70 au
monde : « Vous n’êtes pas allés au monde, vous vous êtes
rendus à lui ». L’ouverture avait pris, en certains secteurs de
l’Eglise, l’allure d’une démission face au diktat du monde et de
l’opinion.
Mais
adaptation et dialogue ne sont pas similaires. Depuis le concile Vatican
II, la théorie des « cercles concentriques » du dialogue
reste une stratégie essentielle de l’Eglise, y compris chez Benoît
XVI. La forme et le but du dialogue peuvent néanmoins ne pas être
identiques d’un pape à l’autre. La façon ordinaire dont les
niveaux inférieurs de l’Eglise pratiquent ce dialogue est aussi très
disparate. N’identifions pas l’Eglise à telle initiative ou
discours de l’un ou de l’autre membre de l’Eglise.
9.
Le principe de laïcité a cantonné la vie religieuse dans la sphère
privée. Cependant les débats qui se déroulent aujourd’hui autour des
communautés, notamment à propos de l’Islam, ainsi que la tendance des
pouvoirs publics de s’entourer des conseils de réflexion où les
grandes religions sont représentées, semblent favoriser une nouvelle
« visibilité » de la religion dans la sphère publique.
Quelles pourraient en être les formes ?
La
laïcité, au sens de laïcisme, n’est pas seulement la volonté de
cantonner le religieux dans la sphère privée mais aussi , comme l’a
montré Jean Madiran à plusieurs reprises, la volonté du pouvoir
temporel non-chrétien d’imposer ses vues et ses valeurs aux instances
religieuses, chrétiennes ou autres.
Les
« comités d’éthique » qui fleurissent de nos jours sont,
dans leur statut actuel, un leurre. Ils n’ont ni plus ni moins d’autorité
qu’un quelconque conseil consultatif. La question devrait d’abord
être celle du fondement de cette « éthique ». Quelle est l’éthique
de ces comités ? Bien sûr pas une éthique chrétienne. Son
fondement est-il au moins la loi naturelle ? Même pas. C’est une
« éthique » indéfinie. La présence des
« religions » dans ces comités est un alibi, un semblant de
tolérance. Le fond des sociétés modernes occidentales tient dans le
fameux principe énoncé par Jacques Chirac : « Non à une
loi morale qui primerait sur la loi civile ».
10.
Comment voyez-vous l’avenir du catholicisme dans une société en proie
à ce que Jean-Paul II appelait « l’indifférentisme » et le
« matérialisme pratique » ?
« Indifférentisme »,
« matérialisme pratique », « relativisme »
sont, en effet, des caractéristiques de nos sociétés occidentales
contemporaines. A vue humaine, on ne voit pas de retournement possible
et rapide de la situation. L’irréligion progresse. Des manifestations
comme les Journées Mondiales de la Jeunesse sont-elles, par exemple, de
nature à faire remplir à nouveau les églises et les séminaires
ou leur succès n’est que l’épiphénomène d’une attente à
laquelle l’Eglise ne répond plus ?
En
France du moins, il y a eu une rupture dans la transmission de la foi,
un effondrement, sous les coups conjugués du fameux « esprit du
Concile » et de l’esprit de Mai 68. L’effondrement a été
plus rapide que ne pourra l’être le redressement. Il en a été ainsi
dans d’autres périodes de l’histoire de l’Eglise : l’extension
de certaines hérésies, dans l’Antiquité, par exemple, a été plus
rapide et massive que ne l’a été ensuite le rétablissement de la
doctrine catholique.
11.
Peut-on concilier, d’un côté, la foi et la raison, et de l’autre, la
science et la foi ? L’activité scientifique se déroule-t-elle,
selon vous, dans un domaine séparé, en sorte que ses résultats ne sont
jamais susceptibles de remettre en cause les vérités de la foi, ou bien
pensez-vous que les relations entre la science et la foi sont d’une
nature nécessairement plus complexe ?
Foi
et raison, science et foi, il n’y a pas là d’antinomie. L’Eglise
a toujours respecté la recherche propre à la raison. Cette recherche
est toujours une attirance pour la vérité. La raison, sur son chemin,
rencontrera forcément la question la foi. Tous les hommes n’
adhèreront pas à la foi, mais saint Thomas a expliqué que foi et
raison viennent toutes de Dieu et donc qu’elles ne peuvent se
contredire.
12.
La miséricorde de Dieu a-t-elle des limites ? Si elle n’en a pas,
comment imaginer l’enfer ? Comment s’articulent le Dieu de bonté
et d’amour et le Dieu de colère et de punition ? Le mauvais usage
que l’homme a fait de sa liberté suffit-il à expliquer que tant d’innocents
aient toujours été massacrés et persécutés dans un monde créé par
un Dieu immensément bon et tout-puissant ?
Comment
répondre à ces questions difficiles – le mal, l’enfer, la bonté
de Dieu a-t-elle des limites – auxquelles tant de penseurs éminents
ont déjà consacré tant de pages ? Certains auteurs ont dit que
Dieu ne cesse pas d’aimer, même en envoyant certaines âmes en enfer,
et c’est justement cet amour de Dieu pour les damnés qui les fait
souffrir parce qu’ils ne peuvent plus y répondre.
Hans
Urs von Balthasar dans Espérer pour tous (1987) puis dans L’enfer
une question (1988) a essayé d’éclairer à nouveau la question.
On l’a accusé d’avoir dit que « l’enfer est vide » et
d’avoir professé l’ « apocatastase » (la
doctrine du salut pour tous). Or, il n’a affirmé ni l’une ni l’autre
position.
Dieu
est Amour, « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et
parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tm 2, 4-5) mais
cette volonté aimante ne s’impose pas de l’extérieur. L’homme,
par sa liberté, peut s’exclure lui-même du salut, c’est-à-dire de
l’éternité.
Yves
Chiron
Ces
réponses sont parues, pages 87-94, dans une « Enquête sur la
foi » menée par Catherine Gravil auprès de 24 auteurs venus d’horizons
assez ou très divers : Yves Amiot, Jean Bastaire, Anne Bernet, Alain
Besançon, Bruno Bioul, Joachim Bouflet, Thierry Boutet, Rémi Brague,
Yves Chiron, Jean Delumeau, Ghislain de Diesbach, François-Georges
Dreyfus, Jacques Duquesne, François Foucart, Christophe Geffroy, Gérard
Leclerc, Jean Madiran, Philippe Maxence, Thierry Paillard, René Rémond,
Jean Salvan, Jean Sévillia, Denis Sureau, Eric Werner.
Ces
24 réponses, à douze questions identiques posées à tous les auteurs
– sauf à Jacques Duquesne à qui il a été posé une treizième
question –, sont précédées d’une préface de Mgr Rey, évêque de
Toulon, et d’un avant-propos de Robert Hossein.
L’ouvrage,
paru sous le titre Paroles d’un croyant, est édité par les
Editions Via Romana (5 rue du Maréchal Joffre, 78000 Versailles), 254
pages, 20 €.
Deux
entretiens et deux articles dans Fideliter
La
revue bimestrielle du District de France de la Fraternité Saint-Pie X, Fideliter,
présente toujours des articles intéressants à divers titres, notamment,
et par exemple, les pages de vie spirituelle que publie dans chaque
numéro l’abbé Vincent Bétin.
Dans
le numéro qui vient de paraître,
quatre autres articles attirent plus particulièrement l’attention :
•
dans un entretien accordé à la revue, l’abbé de Cacqueray, Supérieur
de District, explique de quelle manière la FSSPX est disposée, dès
maintenant, et plus encore lorsque le motu proprio attendu sera
promulgué, « à aider le maximum de prêtres possible à reprendre
et à réapprendre la messe traditionnelle, afin que des fidèles toujours
plus nombreux y aient accès. »
Il
déclare notamment : « Actuellement, en plusieurs endroits de
France, nos récollections sacerdotales accueillent régulièrement des
prêtres ”conciliaires” qui viennent à la fois y recevoir une
nourriture doctrinale et liturgique, et s’encourager par le réconfort
de l’amitié sacerdotale. Nous sommes là au cœur de la vocation de
notre institut. »
•
Dans un autre entretien, Jean Madiran explique, avec la précision et avec
la perception de l’essentiel qui le caractérisent, comment et pourquoi
la revue Itinéraires est entrée dans la bataille pour la messe
traditionnelle à partir du numéro de janvier 1970.
Jean
Madiran y explique pourquoi il y eut, de sa part, à partir de 1969-1970,
« attachement sans condition à la messe traditionnelle » et
« refus absolu de la nouvelle messe ».
On
aurait eu envie de poser une question supplémentaire à Jean
Madiran : Aujourd’hui, après les corrections apportées et à
venir (cf. le paradigme de la « réforme de la réforme »),
l’ « attachement sans condition » à la messe
traditionnelle est-il nécessairement lié à un « refus
absolu » de la nouvelle messe ?
•
On ne quitte pas le sujet de la messe avec l’article de l’abbé Michel
Beaumont intitulé « Un trou noir dans la messe ».Après
lecture de la récente instruction synodale Sacramentum caritatis
publiée par Benoît XVI le 22 février 2007 et relecture de l’encyclique
Ecclesia de Eucharistia de Jean-Paul II (17 avril 2007) et de l’instruction
Redemptionis sacramentum (25 mars 2004), celui qui signe
abbé Michel Beaumont estime que « par ces trois documents
successifs, Rome a entendu donner un enseignement assez complet et adapté
à notre époque sur le mystère de l’Eucharistie, y compris en tenant
compte de certaines critiques “traditionalistes“. »
Il
reconnaît que « la notion de sacrifice est sinon revenue dans l’enseignement
officiel (elle n’avait pas complètement disparu), du moins reproposée
de façon assez explicite » : le mot
« sacrifice » revient plus de 40 fois dans la récente
instruction synodale. La messe n’y est plus définie comme une simple
« reprise de la Cène ».
En
revanche, manque toujours, selon l’auteur, le rappel doctrinal que
la messe est « un sacrifice propitiatoire, qui remet les
péchés et apaise la colère de Dieu justement irrité ».
« Rome
a un vrai problème avec la notion de propitiation » poursuit Michel
Beaumont, qui conclut : « Pour que les efforts de
rétablissement de la saine doctrine sur la messe aboutissent enfin
pleinement, il faudra bien qu’un jour on affronte courageusement et
ouvertement ce trou noir. »
A
ces justes remarques, on ajoutera que la dimension propitiatoire du
sacrifice de la messe n’est pourtant pas complètement absente du
nouveau missel. Lorsque l’édition typique de 1969 fut en partie
corrigée, un long Proemium, en quinze articles, fut ajouté en
1970 à l’Institutio generalis. On y lit cette définition de la
messe : « Missam simul esse sacrificium laudis, gratiarum
actionis, propitiatorium et satisfactorium » (Institutio
generalis missalis romani, édition synoptique, Libreria
Editrice Vaticana, 2006, p. 392 et 393).
•
On lira encore avec profit un article polémique de l’abbé Celier
consacré à la « validité de l’épiscopat ». Certains
auteurs et sites sédévacantistes développent, depuis quelques mois, une
campagne cherchant à démontrer que le nouveau rite de consécration
épiscopale promulgué en 1968 est invalide et que, par conséquent, tous
les évêques consacrés selon ce nouveau rite ne le sont pas et que donc
tous les prêtres qu’ils ont ordonnés ne sont pas prêtres !
L’abbé
Celier démontre que le rite de 1968 est « certainement valide en
soi » mais qu’il peut y avoir des « doutes sur certaines
ordinations », épiscopales et sacerdotales.
On
sait par ailleurs que la FSSPX, à plusieurs reprises, a réordonné des
prêtres dont l’ordination, hors de la FSSPX, avait été jugée
douteuse par elle. |