Un
évêque dominicain pour le diocèse de Saint-Claude
Fin
août, Benoît XVI a nommé le Père Jean Legrez, dominicain, évêque du
diocèse de Saint-Claude, dans le Jura. Le siège était vacant depuis
plus d’un an.
Cette
nomination est significative des choix, en profondeur, de Benoît XVI, eu
égard à la situation française. Elle est significative aussi de l’accession
aux responsabilités dans l’Eglise d’une génération
post-conciliaire, qui a souffert de la crise de l’Eglise. Le parcours de
Mgr Legrez est, en effet, atypique.
Né
en 1948 à Paris, il a effectué ses études primaires et secondaires au
Collège Saint-Jean de Passy (où il a été le condisciple du futur Père
Louis-Marie de Blignières). Il était adolescent au moment du concile
Vatican II. Il a vécu les “ événements ” de mai 68 à l’Université
de Nanterre, où il effectuait des études de lettres modernes.
Entré
ensuite chez les Dominicains, il a reçu sa formation religieuse,
philosophique et théologique dans différents couvents de son ordre
(Lille, Strasbourg, Paris et Toulouse), avec un passage d’une année à
l’Ecole biblique de Jérusalem.
Il
a été ordonné prêtre le 27 juin 1976 à Toulouse. Il a d’abord été
vicaire de la paroisse qui dépendait du couvent de Toulouse. Mais, dès
1977, il quittait l’ordre dominicain, avec le P. Jean-Miguel Garrigues,
qui avait été son professeur de théologie dogmatique patristique.
Cette
rupture d’avec l’ordre dominicain est une illustration de la crise
polymorphe de la quinzaine d’années qui a suivi le concile Vatican II.
L’ordre dominicain, comme quasiment tous les ordres religieux, au moins
en France, traversait depuis des années un maëlstrom qui bouleversait
tout. À cette même époque, estimant que l’ordre dominicain tel qu’il
était en France n’était plus fidèle à ses constitutions fondatrices
et à l’esprit de saint Dominique, des groupes d’inspiration
dominicaine se fondaient de manière autonome : en octobre 1975 à
Clamart, en 1979 à Chémeré.
Le
P. Legrez et le P. Jean-Miguel Garrigues ne vont pas, eux, vouloir
refonder en s’inspirant de l’idéal dominicain. Ils vont participer à
la fondation de plusieurs fraternités monastiques dans différentes
villes : en 1977 à Aix-en-Provence, en 1980 en Avignon, à Lyon,
enfin, à partir de 1983. À Lyon, la Fraternité monastique était
installée à la paroisse Saint-Nizier dont le P. Legrez sera nommé
curé.
Ces
fraternités monastiques paroissiales étaient de petites communautés où
se conjuguaient observances monastiques, office choral dans l’église
paroissiale (donc ouvert aux fidèles), et vie apostolique, marquée
notamment par un accompagnement spirituel des fidèles. Un certain nombre
de fidèles, dont le signataire de ces lignes, ont trouvé, auprès de ces
moines dans la ville, un soutien et un enseignement spirituels qui ont
été déterminants dans leur vie.
Cette
forme nouvelle de vie religieuse et d’apostolat – des “ moines
urbains ” – renouait, en fait, avec une forme très
ancienne du monachisme qui, à l’origine, ne fut pas vécu uniquement
dans la solitude du désert. À cette époque, Jean-Miguel Garrigues et
Jean Legrez ont étudié, d’un point de vue historique et théologique,
cette tradition monastique dans un livre : Moines dans l’assemblée
des fidèles. À l’époque des Pères. IVe -VIIIe siècle, (Beauchesne,
1992).
En1996,
la Fraternité monastique lyonnaise a fermé ses portes. Jean-Miguel
Garrigues a rejoint la Congrégation Saint-Jean du P. Marie-Dominique
Philippe, Jean Legrez est revenu dans l’ordre dominicain.
Ce
retour dans l'ordre des Frères prêcheurs, près de vingt ans après en
être parti, illustre combien l’ordre dominicain avait changé. La
situation des ordres religieux, comme la situation de l’Eglise en
général, n’est plus la même depuis les années de crise des années
60 et 70. Il n’y a certes pas eu restauration à l’identique, et, pour
s’en tenir à la situation française, d’une congrégation à l’autre,
la situation est très différente.
Revenu
dans l’ordre dominicain, le P. Legrez a résidé depuis 1996 au couvent
Saint-Lazare de Marseille, dont il est devenu sous-prieur en 1998, prieur
en 2001 (réélu en 2004). La présence dominicaine à Marseille est
redevenue visible et active, par la restauration du couvent, par l’habit
blanc retrouvé, par la prédication, par la vie liturgique communautaire
ouverte aux fidèles (laudes, messe, vêpres, complies), par des “ conférences
du mardi ”.
La
nomination du P. Legrez comme évêque de Saint-Claude l’a surpris, il l’a
écrit lui-même dans sa première lettre aux prêtres de son diocèse. Le
grand quotidien régional l’Est Républicain, en annonçant, le 23 août
dernier, la nomination du nouvel évêque de Saint-Claude, jugeait qu’il
appartient à la “ mouvance traditionnelle de l’Eglise ”.
L’intéressé ne se reconnaîtra pas vraiment dans cette qualification.
Il n’est certainement pas traditionaliste (à Lyon, les liturgies en
français de sa Fraternité monastique, attiraient beaucoup de fidèles
par le sens du sacré et du surnaturel qu’elles manifestaient, mais
elles déplaisaient aux catholiques attachés au rite traditionnel). Si on
voulait à tout prix lui accoler une étiquette, forcément réductrice,
on le qualifierait, plus volontiers, de “ patristique ”, par
son désir et sa pratique de ressourcement aux Pères de l’Eglise.
Le
diocèse de Saint-Claude est un de ces diocèses, de moins en nombreux,
où il n’y a pas de célébration régulière de la liturgie
traditionnelle dans le cadre du motu proprio de 1988, ni de prieuré de la
Fraternité Saint-Pie X. Les fidèles du diocèse attachés au rite
traditionnel trouveront très certainement auprès de leur nouvel évêque
un accueil bienveillant et attentif.
Rome
– FSSPX : Le
“ dialogue ” renoué
À
la vérité, le “ dialogue ” n’a jamais été rompu entre
la Fraternité Saint-Pie X et le Saint-Siège. Il y a toujours eu, de part
et d’autre, des contacts informels, non officiels. J’ai signalé,
trois fois déjà, qu’un des responsables de la Fraternité Saint-Pie X
avait renoué un contact direct avec le futur pape Benoît XVI dans la
période de l’avant-conclave. De Menzingen, on m’assure qu’un
tel contact direct n’a pas eu lieu à ce moment-là. Disons alors que de
tels contacts, privés, ont eu lieu avant la mort de Jean-Paul II.
Il
est avéré, également, que depuis l’avènement de Benoît XVI,
plusieurs prêtres de la FSSPX ont pris contact avec le Saint-Siège ou
avec le pape lui-même, à titre privé ou en vue de la rencontre au grand
jour qui a eu lieu le 29 août.
Ce
jour-là, Benoît XVI, en présence du cardinal Castrillon Hoyos, a reçu,
à Castel Gandolfo, Mgr Fellay, Supérieur général de la Fraternité
Saint-Pie X, accompagné de l’abbé Schmidberger, Premier assistant
général de la FSSPX, et qui entretenait des relations suivies avec le
cardinal Ratzinger avant qu’il n’accède au Souverain Pontificat.
Sur
la rencontre du 29 août, parmi le flot des commentaires, des
informations, des approximations et des erreurs
qui ont déferlé, il n’est pas inutile de publier intégralement les
communiqués qui, de part et d’autre, ont été publiés pour en rendre
compte :
Saint-Siège:
Déclaration
du Directeur de la salle de Presse
Le
Saint-Père Benoît XVI a reçu ce matin dans le Palais apostolique de
Castel Gandolfo, le Supérieur Général de la "Fraternité Saint-Pie
X", Mgr Bernard Fellay, qui en avait fait la demande. Le Pape était
accompagné de son Eminence le Cardinal Darío Castrillón Hoyos,
Président de la Commission Pontificale "Ecclesia Dei".
La
rencontre s’est déroulée dans un climat d’amour pour l’Eglise et
le désir d’arriver à une parfaite communion.
Bien
qu’ils soient conscients des difficultés, a été manifestée la
volonté de procéder par étapes et dans des délais raisonnables.
Fraternité
Saint-Pie X - Déclaration
de Mgr Fellay
La
rencontre a duré environ 35 minutes, elle s’est déroulée dans un
climat serein.
L’audience
a été l’occasion pour la Fraternité de manifester qu’elle a
toujours été attachée - et qu’elle le sera toujours - au
Saint-Siège, la Rome éternelle.
Nous
avons abordé les difficultés sérieuses, déjà connues, dans un esprit
de grand amour pour l’Église.
Nous
sommes arrivés à un consensus sur le fait de procéder par étapes dans
la résolution des problèmes.
La
Fraternité Saint Pie-X prie afin que le Saint Père puisse trouver la
force de mettre fin à la crise de l’Église en ''restaurant toutes
choses dans le Christ''.
+Bernard
Fellay
Supérieur
Général de la Fraternité Saint-Pie X
Précisions
•
Suite à notre dernier numéro où était publiée la “ Lettre d’un
catholique perplexe ”, une lectrice, éminente spécialiste du
Moyen-Orient et du monde musulman, s’est étonnée des propos de
Jean-Paul II qui y étaient cités. “ Puisse saint Jean-Baptiste
protéger l’Islam ! ”, cette invocation est contenue dans la
prière sur les bords du Jourdain, lors du voyage en Terre sainte et en
Egypte de mars 2000 : le texte intégral a été publié dans La
Documentation catholique, 16.04.2000, page 362.
L’exhortation
aux musulmans : “ Vivez votre foi, même en terre
étrangère ”, a été lancée à Mayence, lors du voyage
apostolique en Allemagne le 17 novembre 1980. Ce discours n’a pas été
traduit en français, mais se trouve dans les discours de Jean-Paul II
tels que les publie le site officiel du Saint-Siège.
•
La revue des religieux d’Avrillé, Le Sel de la Terre (Couvent de
la Haye-aux-Bonshommes, 49240 Avrillé) publie un épais numéro de 450
pages tout entier consacré à Fatima. À côté d’articles
intéressants, et même utiles, par exemple sur la dévotion réparatrice
des cinq premiers samedis du mois, on trouve de nombreux articles de
polémique pour répandre l’idée :
-
que la consécration de la Russie faite en 1984 par Jean-Paul II ne
correspond pas à ce que la Sainte Vierge a demandé lors de ses
apparitions.
-
que les propos tenus par Sœur Lucie, en 1992 devant le cardinal
Padiyara, et, en 1993, devant le cardinal Vidal, – entretiens publiés
en français sous le titre Fatima. Sœur Lucie témoigne, Editions
du Chalet, 1999 – ne peuvent être authentiques puisque Sœur Lucie y
affirme que la consécration de 1984 a répondu au désir du Ciel.
-
Que le 3e secret de Fatima (3e partie du
secret plutôt) révélé en 2000 ne correspond pas au texte authentique,
qui resterait inconnu, et que l’interprétation qu’en a donnée alors
le Saint-Siège est une “ trahison ”.
-
Que les autorités du sanctuaire de Fatima et les autorités
diocésaines veulent construire un “ temple œcuménique ”
sur le lieu des apparitions.
En
contrepoint à ce dossier, on rappellera simplement, fait déjà signalé
ici, que des enregistrements audio et vidéo des entretiens de 1992 et
1993 avaient été effectués. Le 31 janvier 2002, en Italie, sur “ Raidue ”,
l’entretien de 1993 a été diffusé. Des millions d’Italiens ont pu
entendre les propos de Sœur Lucie. Les rédacteurs d’Avrillé
diront-ils que c’est une “ fausse Sœur Lucie ” que l’on
entendait ? |