Sommaire
I.
Rome renoue le dialogue avec la Fraternité Saint-Pie X (document).
II.
Un nouveau livre d’Alain de Benoist.
III.
La disparition de Gustave Thibon (document).
I.
Rome renoue le dialogue avec la Fraternité Saint-Pie X
Divers
signes, ces derniers mois, laissaient comprendre qu’un nouveau type de
relations était en train de s’instaurer entre Rome et la Fraternité
Saint-Pie X. Alètheia, au fil de ses numéros, les avait signalés
: le dialogue, en profondeur, de l’abbé La Rocque, de la FSPX, avec les
prêtres diocésains de France à travers sa Lettre à nos frères
prêtres ; les églises et sanctuaires qui, à Rome et en
France, se sont ouverts à la FSPX à l’occasion du Jubile ; l’entretien
accordé, cet été, à Trenta Giorni par Mgr Fellay, Supérieur
général de la FSPX ; le livre de l’abbé Aulagnier, deuxième
assistant général de la FSPX.
Le
22 janvier dernier, Mgr Fellay a publié un “ Communiqué aux membres de
la Fraternité et aux Communautés amies ” pour annoncer l’ouverture
de négociations entre le Vatican et la FSPX. Ce communiqué était
destiné aux seuls prêtres de la Fraternité qui ne pouvaient en informer
leurs fidèles “ de vive voix seulement ”. “ Le texte lui-même ne
doit pas être remis aux mains des fidèles jusqu’à nouvel avis. Il est
interdit de le publier ” était-il précisé. La FSPX, sans doute, ne
voulait pas laisser le dialogue engagé être parasité par des
commentaires inconsidérés.
Mais
comme la consigne n’a pas été respectée et que le texte du
communiqué est disponible sur internet, en voici, à titre documentaire,
le texte intégral :
Communiqué de la Maison généralice, le 22 janvier 2001
Destiné
aux membres de la Fraternité et aux Communautés amies
1.
Suite à notre pèlerinage à Rome cet été, le cardinal Castrillon
Hoyos a eu un premier contact direct avec les évêques de la
Fraternité en août.
2.
Au mois de novembre, le même Cardinal mandaté par le pape Jean-Paul II
a invité le Supérieur Général à venir “ pour préparer une visite
au pape ”.
3.
Le 29 décembre, le Cardinal Castrillon propose à Mgr Fellay les divers
éléments qui pourraient servir à un possible accord entre Rome et la
Fraternité, et le Supérieur Général exprime son point de vue, ses
méfiances, ses appréhensions. (Bien que jamais Rome ne soit
allé si loin en faveur de la Tradition).
4.
Le 30 décembre, pendant quelques instants, le Supérieur Général
entrevoit le pape dans sa chapelle privée (aucune parole d’importance
n’y est échangée).
5.
Le 13 janvier, réunion spéciale du Conseil général, des évêques de
la Fraternité et du délégué de Mgr Rangel où sont établis les
principes qui nous guident dans la situation présente.
6.
Le 16 janvier, nouvelle rencontre avec le cardinal Castrillon, pendant
laquelle le Supérieur Général expose la nécessité de garanties de
la part de Rome avant d’aller plus avant dans le concret d’éventuelles
discussions ou accord :
•
Que la messe tridentine soit accordée à tous les prêtres du monde
entier.
•
Que les censures qui frappent les évêques soient annulées.
Les
principes qui nous guident à travers cette situation quelque peu
nouvelle sont les suivants :
1.
Rome étant l’auteur de la démarche, il est normal que la Fraternité
l’examine avec le sérieux qu’elle mérite.
2.
Ayant devant les yeux d’une part l’exemple tout récent de la
Fraternité Saint-Pierre, d’autre part la continuité de la ligne post
conciliaire constamment réaffirmée par Rome, notre défiance est
extrême.
3.
La Fraternité n’a aucunement l’intention de modifier ses principes
et sa ligne de conduite. Les fruits si abondants de grâces d’une
part, le désastre conciliaire d’autre part ne font que renforcer sa
détermination à conserver la Tradition catholique.
4.
Si accord il y avait, il ne serait à envisager que dans la perspective
de redonner à la Tradition son droit de cité, même si le triomphe
final ne s’obtiendra que graduellement.
5.
Les prières demandées aux membres de la Fraternité pendant un mois ne
signifient pas du tout notre attente que tout soit réglé durant cette
période ou dans une quelconque précipitation. Il s’agit d’un temps
de prière où nous demandons plus intensément à Notre Dame qu’elle
ouvre les Coeurs des responsables romains et des évêques, qu’elle
nous fasse éviter tout piège et qu’elle fasse triompher dans l’Eglise
les droits de son divin Fils.
Menzingen,
22 janvier 2001
+Bernard
Fellay
On
remarque, dans ce communiqué, la “ défiance extrême ” de la FSPX à
l’égard des discussions engagées et , aussi, la froideur avec laquelle
est évoquée la rencontre avec Jean-Paul II. On remarque aussi, a
contrario, le caractère non-excessif des “ garanties ” demandées par
la FSPX.
Sans
évoquer la teneur des propositions, généreuses, faites par le
Saint-Siège, on peut signaler que Mgr Fellay est venu exposer le 1er
février dernier, aux prêtres de la FSPX de France (les plus nombreux
dans la Fraternité), l’état actuel des discussions avec Rome.
Il
semble que la grande majorité des prêtres de la FSPX voit
favorablement l’ouverture de ces négociations. Il n’en va pas
de même des Dominicains d’Avrillé. Nul doute que si un accord avec
Rome intervenait, certains prêtres de la FSPX, peu nombreux, le
refuseraient, par principe. Déjà, il y a quelques mois, un prêtre qui
avait quitté la FSPX, l’abbé Xavier Grossin, dénonçait les
compromissions de Mgr Fellay avec Rome : “ A chaque visite du Supérieur
Général au Vatican, un de ses prêtres fidèle au dogme de l’infaillibilité
fait les frais de ces politesses en se faisant renvoyer. Il faut bien leur
montrer de la bonne volonté en excluant les durs ” (Le Bastion de
Saint-Maurice, 35360 Montauban-de-Bretagne, octobre 2000).
Ce
même abbé Grossin, avec l’esprit de finesse qui le caractérise ,
dénonçait, dans une lettre, publiée sans signature dans la revue des
Dominicains d’Avrillé (Sel de la terre, n° 31, hiver 1999-2000,
Couvent de la Haye-aux-Bonhommes, 49240 Avrillé), “ les hérésies
gnostiques avec leur cortège d’immoralité ” de “ monsieur Chiron
” et disait prier pour sa “ véritable conversion ”...
II.
Un livre d’Alain de Benoist
Alain
de Benoist passe, à gauche, pour un dangereux homme d’extrême-droite
qui arbore le masque d’une “ Nouvelle Droite ” improbable. Dans
beaucoup de milieux de droite, il passe pour un dangereux “ païen ”
dont la pensée se réduirait à l’anti-christianisme. Il est vrai que
jadis Alain de Benoist a édité Celse et Louis Rougier et qu’il les a
réédités récemment. Il y a quelques mois, il faisait publier un
ouvrage de Ram Swarup (1920-1998) qui fut un des principaux théoriciens
du fondamentalisme hindou. Cet ouvrage, Foi et intolérance
(éditions du Labyrinthe, 70 rue Compans, 75019 Paris, 233 pages, 129 F),
est une analyse critique du christianisme et de l’islam sous “ un
regard hindou ”.
Il
serait injuste de réduire Alain de Benoist à ces caricatures
opposées. C’est, avant tout, un homme de réflexion, curieux de tous
les domaines du savoir. Son dernier livre est la publication de son
journal de l’année 1999 sous le titre : Dernière année. Notes pour
conclure le siècle (L’Age d’Homme, 302 pages). A coté de
nombreuses considérations sur d’autres sujets non-religieux, il s’y
montre quasiment hanté par la figure de saint Paul ; il rapporte
ses recherches sur le (faux) problème des supposés “ frères de Jésus
” ; il évoque, à deux reprises, ses conversations avec l’abbé
de Tanoüarn sur des questions d’exégèse et de patristique.
Certes,
la conception des origines du christianisme qu’a Alain de Benoist est
erronée ( “ Paul a créé une religion nouvelle, ce que Jésus n’avait
jamais eu l’intention de faire. Bel exemple d’hétérotélie ”, p.
83). Mais Alain de Benoist ne fait peur qu’à ceux qui ne le lisent pas
et ne le connaissent pas.
III.
La disparition de Gustave Thibon
La
disparition de Gustave Thibon, le 19 janvier dernier, n’a pas eu, dans
les médias, l’écho dont bénéficie la disparition de personnalités
qui ont beaucoup moins apporté à la civilisation. L’Action
Française 2000 (10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris), dans
son numéro du 1er février, a publié un intéressant hommage au
philosophe “ poète-paysan ” avec des articles de Michel Fromentoux,
Eric Vatré, Antoine Clapas, Robert Gaud et Stéphane Blanchonnet. Le
quotidien Présent (5 rue d’Amboise, 75002 Paris), dans son
supplément littéraire du 3 février, a publié des articles de Danièle
Masson, Rémi Fontaine et Olivier Mirande.
Rappelons
qu’en 1993, après avoir publié depuis 1934 de nombreux volumes d’essais
et d’aphorismes, Gustave Thibon publiait, sous le titre Au soir de ma
vie (Plon, 219 pages), un volume de “ mémoires recueillis et
présentés par Danièle Masson ”.
Sauf
erreur de ma part, le quotidien la Croix n’a consacré aucun
article au philosophe chrétien. Mais l’Eglise ne l’a pas oublié.
Lors des obsèques de Gustave Thibon, un message de l’évêque du
diocèse a été lu. Ce texte n’ayant été publié ni cité dans aucun
quotidien ou hebdomadaire, je crois utile de le reproduire ici
intégralement :
Message
pour les obsèques de Monsieur Gustave Thibon
Le
20 janvier 2001
Je
désire me joindre à vous auprès de Monsieur Gustave Thibon.
Vous
ses enfants et petits-enfants, vous aussi qui l’avez entouré et
accompagné de sollicitude et d’affection. Je vous exprime toute ma
sympathie.
Vous
les paroissiens de Saint-Marcel d’Ardèche lieu de sa naissance auquel
il est toujours resté attaché. Vous perdez un des vôtres dont vous
étiez fiers.
Je
partage vraiment votre peine. Je regrette profondément de ne pas être
physiquement avec vous, cela m’a été impossible, mais je vous suis uni
par la prière.
Vous
connaissez pour la plupart beaucoup mieux que moi Monsieur Thibon, vous
qui lui étiez proches.
Permettez-moi
cependant de lui dire en toute vérité mon admiration et mon Merci et
ceux de l’Eglise. Il a su dans toute la recherche d’une vie, dans
toute sa méditation approfondir le sens de l’homme et de sa vocation
indissociablement liés à la foi chrétienne.
Il
a su être comme un sillon où se rencontrent une véritable humanité et
la grâce de la foi avant de germer ensemble.
Il
en a rendu compte par la parole et par ses oeuvres. Ce fut sa façon d’être
un témoin. L’Eglise de France lui est reconnaissante.
Deux
phrases de lui en correspondance avec ce que nous vivons aujourd’hui :
“
je porte en moi des morts plus vivants que les vivants. Mon plus haut
désir est de les retrouver ”
“
mon Dieu, à ma mort prenez-moi tel que vous m’avez fait et tel que
je me suis défait, ayez pitié en moi de Votre image ”
Que
le Seigneur de l’espérance exauce cette double prière.
François
BLONDEL
Évêque
de Viviers |