LA
DOUBLE BÉATIFICATION
1.
Les raisons d’une double béatification
Si
l’on se réfère à l’Annuario Pontificio qui, en tête de
chacun de ses volumes, publie la liste chronologique de tous les
Souverains Pontifes, 78 papes ont été canonisés et 8 ont été béatifiés.
La béatification de Pie IX et de Jean XXIII, le 3 septembre dernier,vient
donc porter à 10 le nombre des papes béatifiés. Un pape sur trois
qu’a comptés l’Eglise a donc, à ce jour, été canonisé ou béatifié.
La
béatification de Pie IX et de Jean XXIII a ceci de particulier qu’elle
intervient le même jour. C’est la première fois que deux papes sont béatifiés
en même temps. Il ne s’agit pas là, on s’en doute, d’un hasard du
calendrier. Guillaume Goubert, dans la Croix (31.8.2000), croit
avoir découvert une des “clés romaines de la double béatification”
: on a dû “relancer la béatification de Pie IX afin d’éviter
une trop grande personnalisation de Jean XXIII”.
Selon
nos sources d’information, c’est exactement l’inverse qui s’est
produit. Jean-Paul II voulait béatifier un pape dans cette année du
Jubilé pour honorer aussi, à côté des martyrs et des autres saints, un
successeur de saint Pierre. La cause de Pie IX était, de loin, la plus
avancée puisque le décret sur l’héroïcité des vertus était
promulgué depuis 1985. A cette époque, les oppositions à une future béatification
avaient été vives, quoique assez feutrées. Jean-Paul II crut nécessaire,
en 1987, d’instituer une commission spéciale chargée de se prononcer
sur l’ “opportunité” de cette béatification. Deux des sept membres
de cette commission jugèrent la béatification inopportune (le père
Giacomo Martina, jésuite, et le chanoine Roger Aubert, tous deux éminemment
historiens de Pie IX). Pendant plusieurs années, Jean-Paul II sembla donc
se ranger à l’avis de cette minorité.
Quand
et pourquoi a-t-il changé s’est-il finalement résolu à passer outre
à ces avis négatifs ? Quelques hypothèses peuvent être avancées.
En tout cas, c’est bien la béatification de Pie IX qui a été décidée
la première en vue du Jubilé. C’est alors que certains cardinaux
progressistes ont fait part, avec insistance, de leur crainte de voir la béatification
du pape du Syllabus mal comprise et de la nécessité de la
contre-balancer par celle de Jean XXIII.
La
cause de celui-ci fut donc accélérée. Cela apparaît clairement
si l’on examine la chronologie de la procédure (dates relevées dans
les deux dernières éditions de l’Index ac Status Causarum, 1988
et 1999) :
-
ouverture du procès ordinaire le 21 décembre 1974 ;
-
décret sur la validité des procès le 6 mai 1988 ;
-
nomination d’un rapporteur en 1990 ;
-
dépôt de la “Positio super Virtutibus” le 15 juillet 1997.
Quand
la Congrégation des Causes des Saints a publié sa dernière édition de
l’Index ac Status Causarum, en novembre 1999, aucune étape
nouvelle n’avait été franchie. Elles le furent à un rythme accéléré.
Le 20 décembre 1999, fut promulgué le “Decretum super virtutibus”.
Ce qui signifie que les pièces du procès de béatification ont été
examinées en un an et demi, soit une procédure menée dans un
temps record, même si on la compare à celle des causes proches qui ont
abouti rapidement (celle de Mgr Escriva de Balaguer, le fondateur de
l’Opus Dei, mort en 1975 et béatifié en 1992 et celle de Padre Pio,
mort en 1968 et béatifié en 1999).
S’il
y a eu accélération de la cause de Jean XXIII, il est évident que cela
n’a été possible que parce que Jean-Paul II l’a voulue ou, du
moins, l’a acceptée. C’est, peut-être, une des clefs du pontificat
que cette double béatification pontificale. Il serait réducteur, et
presque injurieux pour l’ardeur apostolique qui anime Jean-Paul II, que
de réduire cette double béatification, apparemment contradictoire, à un
délicat exercice d’équilibre ou d’y voir l’illustration d’une
habile politique pontificale.
Dès
les premières années de son pontificat, Jean-Paul II a voulu faire
“retour au centre” (selon l’expression du théologien Hans Urs von
Balthasar, que Jean-Paul II, justement, a créé cardinal) ; le “retour
au centre” étant entendu comme un retour au Christ. “Nous proposons
le repli, écrivait Balthasar, le retour au centre. Non par résignation,
mais pour regagner l’origine. Nous avons échoué sur les bancs de sable
du rationalisme ; faisons marche arrière pour toucher le rocher abrupt du
mystère”1 . Le “centre” c’est aussi, dans cette vision théologique,
la volonté de ne pas opposer et de dépasser par le haut Dans
l’homélie qu’il a prononcée lors de la cérémonie de béatification
du 3 septembre, Jean-Paul II a exalté l’un et l’autre de ses prédécesseurs.
De
Pie IX, à propos duquel il a remarqué, très justement, “il fut très
aimé, mais aussi haï et calomnié”, le pape a loué l’”adhésion
inconditionnelle au dépôt immuable de la vérité révélée”. De Jean
XXIII, il a loué “la simplicité de son âme, conjuguée à une ample
expérience des hommes et des choses !”. Et aussi, il a souligné
l’aspect novateur, la rupture pourrait-on dire, qu’il a introduite :
“La vague de nouveauté qu’il a apportée ne concernait certes pas la
doctrine, mais plutôt la manière de l’exposer.”
2.
La béatification de Pie IX dans la presse italienne
La
béatification de Pie IX a été l’objet de controverses qui ont
été grandissantes. Le Monde a été, sans doute, le journal
qui, le premier et de manière la plus répétée, a dénoncé cette béatification.
Dès le 13 mars 2000, le professeur Jean Delumeau, professeur honoraire au
Collège de France, honoré jadis du Grand Prix Catholique de Littérature
pour ses travaux historiques, avait envoyé, par l’intermédiaire du
journal, une sorte de sommation au Vatican : “Si le Vatican béatifie
Pie IX, il lui faut, pour rester crédible, accompagner cette “
promotion ” d’une mise au point doctrinale. L’Eglise romaine doit préciser
qu’elle désavoue la condamnation par Pie IX de la liberté de
conscience”.
Puis,
le 22 août, dans l’éditorial, non signé, du journal, étaient dénoncées
“L’illusion des JMJ” et, en même temps, la béatification du
“pape le plus réactionnaire de l’histoire”, “auteur d’une répression
féroce contre les patriotes italiens et du Syllabus”. Avant la béatification
encore, le 25 août, en première page, Henri Tincq, revenant sur
l’affaire Mortara, jugeait : “La béatification de Pie IX, archétype
du pape antilibéral, prévue le 3 septembre au Vatican, soulève déjà
l’indignation de la communauté juive italienne. Elle est contradictoire
avec l’esprit de repentance développé par Jean-Paul II. A Rome, ses
avocats mettent en avant la dévotion de Pie IX, sa piété mariale et sa
fidélité à un message chrétien qui doit résister à l’esprit du siècle.
Mais la rigidité de ce pape, père du dogme de l’ “ l’infaillibilité
” pontificale, est-elle une vertu chrétienne ?”
En
Italie, la veille de la béatification, un seul journal mettait le
portrait de Pie IX à la une, c’était le quotidien communiste Il
Manifesto (2.9.2000). La belle photographie occupait près de la moitié
de la page mais elle était agrémentée d’un refus en forme de jeu de
mots : “Pio no”. Non au “pontife de l’absolutisme et
de l’antisémitisme, le pape-roi des décapitations en place
publique”. Et le journal communiste publiait intégralement, en sa deuxième
page, la prise de position de la revue de théologie Concilium -
revue publiée en plusieurs langues - , contre un pape
qui a imposé à l’Eglise “un système paternaliste”, qui “a
cherché à empêcher de nombreux théologiens la sincère recherche de la
vérité” et contre un pape “connu pour ses actions antisémites”.
A
contrario, ce même jour, le quotidien catholique Avvenire
s’attachait à montrer “il volto nascosto di papa Mastai”. Les
analyses du postulateur de la cause de Pie IX, Mgr Gherardini, étaient
rapportées fidèlement. Mgr Gherardini a estimé que le pontificat de Pie
IX a été placé “sous le signe de la fidélité à la tradition de
l’Eglise contre la séduction du temps”. Il a aussi , à la suite de
nombreux historiens, démontré l’erreur historique d’opposer un pape
libéral (celui de l’élection, en 1846) au pape réactionnaire que Pie
IX serait devenu après la révolution de 1848 : “Il suffit de
voir comment l’encyclique Qui pluribus, publiée en 1846,
contient en germe toute la thématique du Syllabus de 1864”.
La
Nazione de ce même 2 septembre croyait utile, et intelligent, dans un
éditorial signé Arrigo Petacco, d’ironiser sur l’élection de Pie IX.
Et ce, en ressortant des ragots sans fondements historiques. Avant
de devenir séminariste, le futur Pie IX aurait été “un playboy de
province” (sic) et “il se murmurait qu’il avait fait partie de la
Charbonnerie”. La Charbonnerie ayant été étroitement liée à la
franc-maçonnerie, c’est l’ancienne rumeur, sans aucun fondement
historique, qui réapparaît opportunément pour jeter davantage de
trouble sur une béatification contestée2 .
Le
quotidien Il Tempo du 2 septembre, lui, face à une pleine page
consacrée à Jean XXIII, consacrait une pleine page à Pie IX pour redécouvrir
“un pontificat trop longtemps ignoré”. Et de souligner les aspects
modernes et réformateurs de son pontificat.
Le
jour de la béatification, le 3 septembre, le communiste Il Manifesto
a fustigé, en première page, “La garde noire de Pie IX” : le terme
visait la messe à la mémoire de Pie IX célébrée la veille,
comme chaque année, en la Basilique Saint-Laurent. Tandis que dans Avvenire,
l’historien Andrea Riccardi saluait la double béatification du
jour comme “la grandeur de tenir ensemble les extrêmes”.
Dans
le grand hebdomadaire Famiglia Cristiana , daté du 3
septembre, un autre historien, Maurilio Guasco, spécialiste du
modernisme, racontait en deux pages “La véritable histoire de Pie IX”.
Il concluait son évocation de la vie et du pontificat de Pie IX en
estimant que c’est “la sainteté intérieure” de Pie IX qui est
offerte en modèle aux fidèles mais que le futur bienheureux peut
“avoir commis des erreurs dans la façon de lire les temps dans lesquels
il lui est donné de vivre”.
Il
Giornale de ce même jour rapportait, en première page, les jugements
de Giovanni Spadolini sur Pie IX. Spadolini, mort en 1994, fut membre du
Parti Républicain Italien, plusieurs fois ministre et chef du
gouvernement italien. Il était aussi un historien éminent du Risorgimento
(le long processus de l’unification italienne qui a abouti à la
disparition des Etats Pontificaux). Le journal révélait qu’au milieu
des années 80, Giovanni Spadolini fut contacté en secret, par celui qui
était alors le postulateur de la cause de Pie IX, Mgr Piolanti. Celui-ci
voulait savoir comment serait considérée par les historiens
du Risorgimento une éventuelle béatification de Pie IX. La réponse
de Spadolini fut d’une grande honnêteté intellectuelle. Il
estimait que “l’historiographie laïque, sérieuse” n’aurait
“rien à craindre de la béatification de Mastai Ferretti”.
Spadolini portait aussi ce jugement historique sur Pie IX :
“Dans
l’esprit de Pie IX, un des papes les moins politiques que l’Eglise a
eus dans les temps modernes, la préoccupation religieuse prévalait de
loin sur les considérations diplomatiques .. Son souci principal était
de fortifier la foi catholique, de sauvegarder l’intégrité du magistère
pontifical des pièges et des menaces des courants révisionnistes hérétiques
et libéraux...”.
Le
journal révèle aussi que Spadolini a eu un entretien sur Pie IX avec
Jean-Paul II. Sans avoir encore tous les éléments qui permettent
de retracer l’histoire complète de la béatification de Pie IX, on peut
penser que ce jugement d’un historien républicain sur Pie IX a pu
amener Jean-Paul II à considérer que finalement sa béatification n’était
pas aussi “inopportune” que certains le disaient.
On signalera encore un livre que Giulio Andreotti, l’ancien ministre et
chef de gouvernement démocrate-chrétien, vient de publier : Sotto
il segno di Pio IX (éditions Rizzoli, Milan, août 2000, 146 pages).
Cet ouvrage, de circonstance, n’apprend, au long de la plupart de ses
courts chapitres, rien de nouveau sur le nouveau bienheureux et son
pontificat. En revanche, le premier et le dernier chapitres sont de très
opportunes réponses à certaines accusations portées contre Pie IX.
Pie
IX aurait fait exécuter des “patriotes” italiens :
l’accusation, que l’on trouve dans une certaine presse italienne, a été
reprise en France. Giulio Andreotti rétablit les faits : deux
terroristes, seulement, furent exécutés, Giuseppe Monti et Gaetano
Tognetti, coupables d’avoir placé une bombe dans une caserne proche du
Vatican. L’attentat causa la mort de 35 soldats et d’une femme qui
passait par là avec son enfant. Pie IX ne crut pas devoir accorder la grâce
à ces assassins fussent-ils animés de sentiments “patriotiques”.
Quant
à l’antisémitisme supposé de Pie IX, avant d’expliquer clairement
l’affaire Mortara, Andreotti rappelle avec précision, pages 140 à 143,
les actes et décisions du pape en faveur des Juifs de Rome.
3.
Jean XXIII, une béatification contestée
Au
lendemain de la mort de Jean XXIII, Jean Madiran publiait un très bel éditorial
dans Itinéraires (n° 75, juillet-août 1963, p. 3-12). Intitulé
“Jean XXIII, le Pape de l’Agonie”, l’éditorial soulignait les
grandes vertus de piété, naturelle et surnaturelle, du pape défunt.
Jean Madiran écrivait notamment :
“Le
Pape Jean XXIII donnait l’exemple simple et spontané de la vertu la
plus oubliée par le monde moderne, la piété. Il manifestait une grande
piété naturelle envers ses parents, le village de son enfance, le diocèse
de sa jeunesse, ses maîtres et ses supérieurs d’autrefois. Il
manifestait une grande piété surnaturelle s’exprimant par les prières
et les dévotions les plus traditionnelles. Le langage usé d’un monde
vieilli n’emploie plus guère les mots de “ piété ” et de “ bonté
” qu’avec un accent péjoratif ou ironique. Le Pape Jean XXIII leur a
rendu une vie nouvelle. Le monde contemporain n’a probablement pas bien
compris ce que disait et ce que voulait ce Pape, mais le monde entier
sentit qu’il était un pape pieux et bon, et c’est pourquoi Jean XXIII
fit une impression si grande sur ceux qui le virent prier et sur ceux qui
le virent sourire.”
Cette
présentation de Jean XXIII n’a pas perdu de sa valeur et si les médias
ont évoqué à satiété la “bonté” de Jean XXIII, bien peu
ont mis en valeur sa piété. Jean Madiran, dans l’éditorial cité,
rappelait que le pape avait publié, en 1961, une Lettre apostolique
sur la récitation et la méditation du Rosaire. Mais Jean Madiran a été
attentif à d’autres aspects de la personnalité de Jean XXIII. En une
autre occasion, faisant une “Intéressante révélation
concernant Jean XXIII” (Itinéraires, n° 247, novembre 1980, p.
152-155), il citait le “mot terrible” de l’abbé Berto sur Jean
XXIII :
-
C’est un sceptique.
Et
il le commentait ainsi :
“Un
sceptique, oui ; mais non point, pour autant, impartial entre les
doctrines, ou indifférent devant elles. Comme tous les sceptiques de tempérament,
il inclinait activement du côté des anti-dogmatiques ; des modernistes ;
des sillonistes.”
La
piété, indéniable, de Jean XXIII suffit-elle donc à en faire un
bienheureux ? Les vertus examinées dans un procès de béatification sont
les vertus cardinales de foi, d’espérance et de charité (envers Dieu
et envers le prochain) et les vertus cardinales de prudence, de justice,
de tempérance et de force. Peut-on dire que Jean XXIII a pratiqué toutes
ces vertus “in gradu heroico” ? Et aussi, Jean
XXIII n’a-t-il eu aucune responsabilité dans la crise qui a ravagé
l’Eglise ? Même s’il est vrai qu’elle avait commencé avant
son pontificat .
Ces
questions, ou cette contestation d’une béatification qui, rappelons-le,
n’est pas un acte infaillible du Magistère, ont été apportées par
certains :
•
Bien avant que la béatification de Jean XXIII ne soit annoncée, ni même
envisagée, l’abbé Francesco Ricossa, directeur de l’Institut Mater
Boni Consilii, avait commencé la publication d’une longue série
d’articles, très critiques, intitulée “Le Pape du Concile”. La
position ecclésiologique de l’Institut Mater Boni Consilii s’appuie
sur les thèses soutenues jadis par le père Guérard des Lauriers : en
considérant la grave situation que connaît l’Eglise, les fidèles
sont en droit d’estimer que le Saint-Siège est “formellement
vacant” et qu’il est légitime de consacrer des évêques sans mandat
pontifical.
Sans
partager ces thèses de l’Institut, on lira avec profit la série
d’articles publiée par l’abbé Ricossa dans la revue de son Institut,
Sodalitium (Località Carbignano 36, 10020 Verrua Savoia,
Italie). La revue a une édition italienne et une édition française, qui
est envoyée gratuitement à ceux qui en font la demande. A partir du n°
22 de l’édition française (nov.-déc. 1990), vingt-deux articles sont
parus et la série n’est pas terminée. On y trouve une grande richesse
d’information historique même si on peut ne pas être d’accord avec
certaines analyses. Il est à souhaiter que ces articles soient réunis
un jour en volume.
•
C’est en prévision, cette fois, de la béatification de Jean
XXIII que l’abbé Simoulin, supérieur du district italien de la
Fraternité Saint-Pie X, a publié un épais dossier de contestation
intitulé : “Il
“
papa buono ” : un buon papa ?”. Ce dossier, d’une cinquantaine de
pages, fait l’objet d’un numéro spécial de la revue La Tradizione
Cattolica (Priorato Madonna di Loreto, Via Mavoncello 25, 47828
Rimini, Italie). Dans une étude plus doctrinale qu’historique, avec de
nombreuses citations de textes de Jean XXIII mis en opposition avec les
actes magistériels de ses prédécesseurs, l’abbé Simoulin met en
cause quatre “sophismes” du “bon pape Jean” : instaurer
“un nouvel ordre des rapports humains”, “chercher ce qui unit et
mettre de côté ce qui divise”, “il faut se mettre à jour [ le
fameux aggiornamento ] et exprimer la doctrine dans les formules de
la pensée moderne” et “il convient d’user de miséricorde plutôt
que de sévérité et condamner”.
Pour
ceux qui ne lisent pas l’italien, signalons que l’abbé Simoulin a
publié un résumé de son étude dans la revue Fideliter 3 (n°
136, juillet-août 2000, p. 46-51) : “La bonté du pape Jean ?”.
•
La revue Certitudes 4 , dans son numéro 3, publie elle aussi
un dossier pour contester cette béatification. On y trouve d’abord un
longue étude, d’ordre historique, intitulée “Jean XXIII, regard
critique sur une béatification” (p. 6 à 42), étude qui considère
toute la vie d’Angelo Roncalli devenu Jean XXIII. Puis l’abbé de Tanoüarn
publie une étude doctrinale du discours d’ouverture du concile Vatican
II, Gaudet Mater Ecclesiae, un discours de rupture.
4.
Des livres sur Jean XXIII
Si
les ouvrages consacrés à Pie IX sont peu nombreux en français, en
revanche, de nombreux ouvrages de Jean XXIII ou consacrés à Jean XXIII
sont parus. Je n’en signalerai que trois :
-
Peter Hebblethwaite, Jean XXIII, le pape du Concile, Bayard éditions,
608 pages, 170 F. C’est la réimpression, sans changement, d’un
ouvrage paru en 1988 aux éditions du Centurion. L’ouvrage est assez
anticonformiste quoique empli d’admirations pour Jean XXIII. La
bibliographie est très ample et approfondie. L’auteur souligne
notamment, pour plusieurs discours ou documents du pontificaux, l’écart
entre la version officielle, promulguée, et la version primitive, réellement
prononcée par Jean XXIII et parue dans la presse. On “corrigeait” le
pape, dans un sens traditionnel.
-
Paul Dreyfus, Jean XXIII, Le Sarment/Fayard, 486 pages, 140
F. Là aussi, il s’agit d’une réédition. L’ouvrage était paru aux
éditions Fayard en 1979. La nouveauté réside dans la préface de huit
pages que Mgr Capovilla, ancien secrétaire particulier de Jean XXII, a
donnée pour cette réédition. Mgr Capovilla aura beaucoup fait pour la
cause du nouveau bienheureux mais on peut se demander s’il n’en
a pas fait “trop”. Par exemple, l’édition du Journal de l’âme
qu’il a établie en 1964 et qui a aussitôt été traduite en
plusieurs langues (aux éditions du Cerf pour la traduction française),
est une édition expurgée, tronquée, sans que cela apparaisse
clairement. C’est depuis qu’une édition critique est parue en Italie
qu’une comparaison a pu être faite.
-
Mario Benigni et Goffredo Zanchi, Le Bon Pape Jean, Albin Michel,
382 pages, 145 F. Il s’agit de la traduction d’un ouvrage italien,
adaptation devrait-on dire puisque la plupart des nombreuses notes de l’édition
italienne et certains passages ont été supprimés. Mgr Mario Benigni, décédé
le 12 mai dernier, était le vice-postulateur de la cause de béatification
de Jean XXIII. Pour achever son travail, il fit appel à Goffredo Zanchi.
C’est la “biographie officielle” de la postulation qui est ainsi
publiée.
-
enfin, on signalera que l’article, célèbre, du père Rouquette
s.j., “Le Mystère Roncalli”, publié en juillet 1963 dans la revue Etudes
5 , a été réimprimé dans la même revue (numéro de
juillet-août 2000, p. 109-123). Le père Robert Rouquette y présentait
la “personnalité extrêmement riche, multiple par là même et parfois
déconcertante” de Jean XXIII. L’article vaut d’être lu ou relu.
Nonce à Paris, où le père Rouquette l’a bien connu, beaucoup
croyaient qu’il “penchait vers l’intégrisme”. “Nous n’avons
rien compris alors” reconnaîtra le père Rouquette. |